Le G20 avait fait l'esquisse à Pittsburgh de ce que devrait être l'économie mondiale en 2010 et a convenu des premières actions. Mais, c'est à Istanbul que le FMI — dont le directeur général souhaite pour l'Afrique une représentation plus importante au G20 — va finaliser le tableau et indiquer les orientations pour maintenir le cap de sortie de crise. Que dit d'abord son rapport portant sur les perspectives économiques mondiales (World Economic Outlook-WEO, october 2009) publié à la veille de la tenue des assemblées annuelles du FMI et de la Banque mondiale à Istanbul, du 2 au 7 octobre 2009 ? Une confirmation d'abord : l'année 2009 sera bien la plus mauvaise année qu'aura connue l'économie mondiale depuis la Deuxième Guerre mondiale avec un taux de croissance négatif de -1,1%. Une prévision ensuite : la croissance mondiale sera de 3,1% en 2010 tirée par les pays ou groupes de pays suivants de façon décroissante : la Chine (9%), l'Inde (6,4%), les économies en développement (5,1%), le Japon (1,7%), les Etats-Unis (1,5%) et enfin l'Union européenne (UE) avec 0,3% seulement. Seul bémol pour le FMI, la peur “d'une reprise sans emploi” qui aggraverait la crise sociale aux Etats-Unis mais surtout en Europe. À ce propos, l'anniversaire, aujourd'hui, du 5 Octobre1988, nous rappelle le souvenir douloureux de la plus grave crise sociale depuis notre indépendance. S'agissant de l'Algérie, le même rapport la crédite d'un taux de croissance qui devrait s'établir à +2,1% en 2009 pour remonter à +3,7% en 2010. Je précise simplement au lecteur qu'il s'agit-là de la croissance globale de l'économie algérienne pour ces deux années, la croissance hors hydrocarbures étant largement supérieure autour de 6%. Quels enseignements devrons-nous tirer de tout cela en cette période cruciale de préparation d'une loi des finances 2010 (LF 2010), particulièrement attendue avec beaucoup d'intérêt à l'intérieur comme à l'extérieur? Au plan extérieur, la LFC 2009 nous a valu déjà la visite de Paul Burkhead, directeur pour l'Europe et le Moyen-Orient de l'institution américaine chargée du commerce. Il a directement fait part de son appréhension sur l'obligation d'une participation majoritaire algérienne pour tout IDE, précisant que “beaucoup de compagnies américaines aspirent toujours à avoir la majorité des parts dans leurs investissements à l'étranger. Elles sont même incapables d'investir dans un environnement de minorité d'actions”. Dans le même registre et plus près de nous, les autorités françaises de la région Provence-Côte d'Azur (Paca) se proposent de rencontrer les responsables algériens pour leur faire part des conséquences négatives résultant de la diminution des importations algériennes à partir du port de Marseille. Nonobstant les avis que peuvent avoir les uns et les autres sur la pertinence de ces mesures, en fonction de leurs intérêts probablement légitimes mais lisibles par tous, j'ai voulu me faire ma propre idée sur la question en relisant l'excellent “Rapport 2008 portant sur l'évolution économique et monétaire en Algérie”, publié en juin 2009 par la Banque d'Algérie. C'est ainsi que le tableau 17 de la page 205, relatif à la composition des importations et des exportations, montre que les importations alimentaires — entre l'année 2006 (3,572 milliards de dollars) et l'année 2008 (7,397 milliards de dollars) — ont plus que doublé. Autres chiffres inquiétants : les importations de biens de consommation non alimentaires ont augmenté de deux tiers entre 2004 (2,61 milliards de dollars) et 2008 (4,122 milliards de dollars). J'observe en outre que la balance des services, toujours déficitaire, exercera une forte pression sur notre balance de paiements. Je citerai pour cela le tableau 16/1 relatif à la balance des paiements de la page 203 du même rapport de la Banque d'Algérie. Ainsi le poste débiteur “services, hors revenus des facteurs, net” a été multiplié par près de 4, passant de moins 2,01 milliards de dollars en 2004 à moins 7,59 milliards en 2008. Si l'on ajoute à cela des revenus d'exportation divisés par deux en 2009, je vois mal comment —à l'analyse de tels chiffres — les pouvoirs publics pouvaient rester sans réaction. Résultat de la mise en œuvre de ces mesures (peut-être) et du redressement des prix du baril (sûrement), notre balance commerciale, selon le FMI, sera légèrement excédentaire en 2009. Il est attendu un excédent commercial de 2,7 milliards de dollars en 2009 — alors qu'il était à titre de comparaison de 23,2 milliards en 2008 — avec une prévision meilleure pour 2010 de l'ordre de 7,3 milliards de dollars. Aussi, concernant la LF 2010, au-delà des attentes des uns et des autres, y compris de celles de nos partenaires, on voit bien que les deux priorités sont de maintenir le même rythme d'investissement en veillant aux équilibres sociaux et de corriger les dérives signalées qui existaient avant la crise mais que cette dernière a aggravées. C'est pour cela que finalement, d'Istanbul à Alger, chacun voit midi à sa porte, car nécessité fait loi. M. M.