Après la fête qui a suivi la qualification algérienne à la Coupe du monde de football, les élèves et leurs parents s'attendaient à la fin de la grève initiée par trois syndicats d'enseignants. C'était une illusion malgré les signes de bonne volonté et les réponses positives avancées par les pouvoirs publics. D'aucuns diront que c'est l'approche des fêtes de l'Aïd el-Kébir qui a fait retarder cette reprise. Des parents, et ils sont nombreux, s'attendent à une année blanche. Le cauchemar ! Il y a lieu de les rassurer. Et c'est un devoir que de le faire puisque c'est l'avenir des enfants qui est en jeu. Une chose est certaine : dans le secteur de l'éducation, les conflits entre adultes — les administrés et la tutelle — se terminent toujours par des accords de dernière minute. Autour de la table, les deux parties finiront, à un moment ou à un autre, par afficher une satisfaction pour la réussite du dialogue. Il ne faut jamais perdre de vue que dans ce secteur — et c'est valable dans n'importe quel pays du monde — les protagonistes du jour ne sont ni plus ni moins que des éducateurs dont la raison d'être est l'enfant. Toutefois entre le début du conflit et sa fin — c'est-à-dire les félicitations à la fin du dialogue —, il y a inévitablement une catégorie qui ne se réjouira pas de la même manière. Ce sont les élèves. Ils seront contents de reprendre mais seuls eux savent le prix à payer. Nous avons en mémoire le calvaire enduré par les enfants du boycott dans les wilayas de la Kabylie lors de l'année scolaire 1994/95. Qui peut aujourd'hui donner une estimation exacte des pertes intellectuelles et psychologiques causées par cette longue désertion des salles de classe. Dommage, il s'agit là d'un thème qui sied à des recherches universitaires. Mais qui a pensé à les mener ? Personne. En 1995, il y a lieu de signaler qu'il y avait une unanimité autour de la revendication identitaire. L'éthique professionnelle nous autorise-t-elle à impliquer de nouveau les élèves dans des conflits d'adultes ? La sagesse nous dicte de les prémunir des querelles d'adultes. Concernant la grève actuelle qui entame sa troisième semaine, les enseignants grévistes ont des revendications légitimes. Elles se résument en trois points : l'effet rétroactif des indemnités, la cogestion des œuvres sociales du secteur et la médecine du travail. Qui peut s'opposer à de telles revendications quand elles sont posées en termes clairs et transparents ? À ce jour, la réponse des pouvoirs publics va dans le sens de la satisfaction de ces trois dossiers. Le communiqué des services du Premier ministère entérine la rétroactivité demandée. Il reste le fond : quelle est la nature et le montant des ces indemnités. Du dialogue serein jaillira le consensus. Pour sa part dans un communiqué, le ministère de l'Education nationale assume sa disponibilité à débattre des dossiers de la médecine du travail, des œuvres sociales et des modalités d'application du décret portant sur les indemnités. Mais peut-il à lui tout seul régler ces deux dossiers ? Non. Seules des commissions mixtes renforcées par des spécialistes pourront déblayer le chemin vers des solutions radicales. À ce niveau d'intervention, d'autres secteurs sont concernés : le ministre de la Santé, celui du Travail et de la Sécurité sociale, les Finances et la Fonction publique. D'un commun accord, les syndicats et le MEN ont convenu de poursuivre et d'approfondir le dialogue. Signe encourageant qui donnerait des motifs de satisfaction aux parents et aux élèves si d'un autre côté, la grève ne continuait pas. Personne n'a compris l'attitude des syndicats à continuer un mouvement qui verra les seuls élèves perdre au change. Dans une telle situation, il faut savoir raison garder. Les réponses données aux revendications des syndicats ne peuvent que remettre de l'espoir — après celui de la victoire — dans le cœur des parents désemparés par le spectre d'une année blanche. Sur ce plan, dans son communiqué, le MEN a affirmé qu'un dispositif de rattrapage des heures de cours non dispensées a été mis en place. Il ne reste qu'à voir le bout du tunnel pour que le sourire revienne sur les visages de nos petites têtes brunes. A. T. (*) Pédagogue