Selon des sources proches du dossier, le Home Office pourrait réclamer un nouveau report à l'expiration du délai du 31 mars. Dans quel cas, le tribunal de Westminster prévoit de tenir une audition, en présence des différentes parties, pour demander au gouvernement de se prononcer définitivement sur cette affaire. Une nouvelle fois, le ministre britannique de l'Intérieur ajourne sa décision sur l'extradition d'Abdelmoumen Rafik Khelifa en Algérie. Il devait se prononcer sur cette question, au plus tard vendredi dernier. Mais à sa demande, le tribunal de Westminster vient de proroger le délai de réflexion jusqu'au 31 mars prochain. Le Home Office est à sa quatrième demande de report depuis l'annonce du verdict du juge Workman, le 25 juin 2009, en faveur du transfert de l'ex-milliardaire. Personne n'est capable de dire précisément pourquoi il peine à trancher sur cette affaire. Ni les avocats ni la partie civile. Ces deux parties nient d'ailleurs avoir une quelconque responsabilité dans les ajournements. S'exprimant au nom de la défense, Maître Ben Brandon est catégorique. “Nous ne sommes pas à l'origine des blocages”. Selon lui, les explications données cette fois-ci par les représentants du ministère de l'Intérieur pour obtenir un nouveau report “ne sont pas convaincantes”. Pourtant, côte algérien, les raisons semblent claires. Selon des sources à Londres, proches du dossier, les réserves systématiques exprimées par la défense ralentissent le processus de décision. Les doutes des avocats concerneraient le contenu des assurances diplomatiques présentées par l'Etat algérien dans le cadre du rejugement de Khelifa. “Il s'agit de points de détails en rapport avec la législation algérienne”, observe notre source, qui décrit les différents ajournements comme le mouvement d'un ascenseur. “Le département de l'Intérieur transmet les remarques des avocats au ministère algérien de la Justice, lequel apporte des éclaircissements. À la réception des réponses, le Home Office délivre une copie à la défense, pour examen. Celle-ci fait de nouveaux commentaires. Et la machine repart.” Le département de Tayeb Belaïz devait fournir ses dernières réponses avant le 22 janvier dernier, soit une semaine avant l'écoulement du délai de la justice. Existe-il d'autres raisons aux interminable atermoiements que l'opinion ignore ? Notre source assure qu'il n'y en a aucune, y compris au niveau politique. A contrario, certaines voix croient savoir que Londres en réalité, voudrait faire de la vente concomitante, en accompagnant la livraison de Khelifa de la signature d'un contrat de vente d'armes à l'Algérie. “Comment expliquer autrement tous ces retards ? Après la sentence du juge, il y a plus de six mois, tout le monde s'attendait à ce que la décision du Home Office soit prise rapidement”, note un analyste qui souhaite garder l'anonymat. À l'annonce du verdict, Anna Rothwell, seconde avocate de Khelifa, avait annoncé que la défense ferait appel devant la Haute-Cour. Sa déclaration laissait entendre que le ministère de l'Intérieur allait probablement confirmer l'arrêt du tribunal de Westminster. Mais à ce jour, sa position reste inconnue. Selon notre source, un autre report n'est pas exclu si le ministère de l'Intérieur le demande pour mûrir davantage sa décision. Néanmoins, elle estime que tous ces ajournements ne peuvent pas se poursuivre indéfiniment. “À un certain moment, la cour pourrait dire, ça suffit.” Plus précis, Me Brandon révèle que le tribunal de Westminster prévoit la tenue d'une audition, en présence des différentes parties, en cas où le Home Office réclame un nouveau délai de réflexion. En mars prochain, Khelifa bouclera sa quatrième année en prison à Londres. Il avait été arrêté en 2006 par des éléments de la brigade économique et financière de Scotland Yard. Son interpellation est intervenue dans le cadre de l'exécution d'un mandat d'arrêt européen lancé contre lui par un tribunal parisien, qui enquêtait sur la faillite de certaines filiales de son groupe, domiciliées en France. La même année, la justice hexagonale introduisait auprès de son homologue britannique une demande d'extradition visant l'ex-golden boy. La requête avait été acceptée en août 2007. Deux mois plus tard, l'Algérie faisait valoir officiellement son propre souhait de se faire livrer Khelifa. Les auditions avaient commencé en mars 2008 et se sont étalées sur 16 mois. En dépit de l'avis favorable du tribunal, personne n'est capable de dire aujourd'hui, si l'ancien milliardaire retournera vraiment en Algérie. S'exprimant sur les lenteurs dans le traitement du dossier de transfert par l'Exécutif britannique, notre source indique qu'il n'est de l'intérêt de personne que l'affaire s'éternise. Les avocats de Khelifa espèrent qu'il soit libéré au plus vite. De leur côté, les autorités algériennes, par la voie du ministre de la Justice, tentent de se montrer patientes. “On peut exprimer le vœu qu'il soit extradé rapidement. Mais la décision appartient au gouvernement britannique”, affirme notre source.