Les deux syndicats autonomes signataires de l'appel au débrayage dans le secteur de l'éducation ont maintenu la pression en poursuivant leur mouvement et même à le durcir. Les plus hésitants d'entre les enseignants de la wilaya d'El-Tarf, qui n'avaient pas débrayé mercredi, ont rejoint le peloton, jeudi, portant le taux de participation global dans les trois secteurs confondus de 75 à 92%. La circulaire ministérielle diffusée dans la matinée de jeudi dans les établissements scolaires n'a pas dissuadé les grévistes, bien au contraire. Toute la corporation persiste à dénoncer unanimement le “fait que la tutelle ait affiché les fiches de paie sur les journaux et crié au scandale”, expliquant que cette pratique de justificatifs tendant à culpabiliser les enseignants à chaque fois qu'une grève est déclenchée dans le secteur est devenue systématique. Un enseignant exaspéré par ces faux-fuyants nous a accostés pour dénoncer avec véhémence cette méthode qui ne sert, selon lui, qu'à tromper l'opinion publique et qui s'apparente à un appel au meurtre déguisé. “En nous présentant comme des inconscients et des éternels insatisfaits, la tutelle nous expose au pire dans la pratique quotidienne, alors que le salaire de l'enseignant représente des miettes par rapport à celui des cadres d'autres secteurs d'activité, pourtant formés par ce secteur même”, s'indignera ce professeur de langue arabe et d'expliquer que “si le mouvement a été suivi massivement cette fois, c'est parce que le Cnapest et l'Unpef ont su mobiliser les enseignants, dès le mois de novembre dernier, et que les pouvoirs publics ont laissé les choses pourrir entre-temps”. Le premier responsable de l'Unpef à El-Tarf, contacté au téléphone, s'en prend ouvertement au vieux syndicat : “Où sont passées les troupes de l'UGTA ? Sur le terrain, la majorité écrasante des adhérents de ce syndicat a rejoint par vagues successives l'Unpef, le Snte ou le Cnapest.” Au niveau de la Direction locale de l'éducation, les principaux responsables ne semblent pas être émus outre mesure par les taux de participation affichés, alors que les parents d'élèves, concernés en premier chef, parlent avec insistance d'année blanche puisque c'est la quatrième semaine de grève qui s'entame depuis le début de l'année. Les mêmes constatations sont faites par nos correspondants à Annaba, Guelma et Souk-Ahras où les cours ont été complètement gelés dans les trois paliers. À Souk-Ahras, les enseignants signalent que les chefs d'établissement ont fait l'objet de pressions pour casser la grève coûte que coûte. Certains directeurs, notamment ceux assurant l'intérim ou nouvellement nommés, auraient même été menacés de représailles par leur tutelle.