Ses mille et un tentacules touchent tous les secteurs et domaines de la vie. À tous les niveaux de la hiérarchie, la corruption est pratiquée avec un sérieux et une abnégation, jamais égalés. On ne joue pas avec la corruption ! Cet auguste sport national, appelé également “pots-de-vin” entre initiés, ou “tchipa” pour les intimes, requiert dévouement et sacrifice à toute épreuve. Son lieu de prédilection, l'administration publique. Aucun secteur n'y échappe ! Simples travailleurs, cadres supérieurs, chômeurs, riches, pauvres, la contagion est quasi totale ! Mais… l'on a n'a rien vu ! Même sale, il n'a pas d'odeur ! C'est peut-être parce que l'argent n'a pas d'odeur, qu'on n'a pas senti venir le (coût) ?! Cependant, l'argent sale est loin d'être le propre de l'Algérie. La corruption des fonctionnaires à grande échelle, telle que pratiquée chez nous, est une véritable entrave aux droits les plus élémentaires de la population. Droit à l'alimentation, au logement, à la santé, à l'éducation… Il est, en effet, de plus en plus difficile, de nos jours, de subvenir à ses besoins alimentaires, quand on sait que le snmg est à peine à 15 000 DA. À condition, bien entendu d'avoir un travail ! Tout comme il est impossible de se loger décemment. Les prix réels des logements étant inaccessibles. Même en locatif ! L'éducation et la santé coûtent très cher également. Faute de trouver entière satisfaction au sein des structures publiques. Tous ces dysfonctionnements ont pour conséquence directe la corruption ! Parce qu'on monnaye tout ! L'enseignant préfère prendre “ses” élèves en cours complémentaires, le médecin vous suggère un rendez-vous en privé dans une clinique, et pour le logement, il faut payer une dîme “symptomatique''… et s'armer de patience. Quant à la consommation… y a qu'à se contenter du pain et du sachet de lait, tant que leurs prix seront encore soutenus par l'Etat. Mais n'y a-t-il pas là, non-assistance à population en danger ?! Finalement, est-ce plus facile d'affamer tout un peuple, que de s'attaquer au vrai problème ? Les accros de la tchipa, ils sont partout ! Depuis 1999, le chef de l'Etat a toujours insisté, dans ses différents discours sur la nécessité de lutter contre le fléau de la corruption. Onze longues années après, rien de sérieux, en matière de lutte, n'a été entrepris. En 2004, l'épineux problème de la corruption figurait également en bonne place dans la campagne électorale du président. Redondance en 2009. “En attendant, moi je dors”, disait Fernand Renaud, dans sa pièce. “Moi, je corromps”, semble agir un certain fonctionnaire algérien… parmi tant d'autres ! Et pour beaucoup d'entre eux, en toute impunité ! Selon le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, de 2006 jusqu'à 2009, plus de 4 000 affaires de corruption ont été traitées par la justice. Soit ! Mais, combien sont-ils à nous narguer au quotidien, sans que personne ne les inquiète ? Ils, ce sont tous ces fonctionnaires qui nous rendent la vie si pénible au quotidien ! On les retrouve à la mairie, à la daïra, à la wilaya, aux douanes, dans les tribunaux, sur les routes, en bleu ou en vert, selon leur corps d'appartenance, à l'hôpital, et même à l'école ! Ils sont partout ! Dieu merci, il n'y a pas qu'eux ! Mais, même quand il n'y en a qu'un seul, il serait de trop ! Un Observatoire pour observer ! Ils sont pourtant facilement repérables ! Il existe ce qu'on peut appeler des signes de richesse ! Comment expliquer qu'un simple fonctionnaire, fusse-t-il super bien rémunéré par son institution, puisse construire R+4 et rouler en carrosse ! Même à raison de 50 000 DA par mois sans manger ni boire, il lui faudrait plus de deux générations d'économie pour réaliser son rêve ! Il est mathématiquement utopique d'accomplir en toute honnêteté le dixième de ces œuvres. Et ces énergumènes-là, on les croise tous les jours. On n'a nullement besoin d'attendre de créer des commissions de lutte contre la corruption pour les démasquer. Encore moins, un observatoire national ! On ose d'ailleurs espérer que cette structure ne se contentera pas d'observer. Sa création est prévue pour la fin du mois en cours. Elle aura pour objectif d'élaborer des stratégies de lutte contre ce fléau. Ces nouveaux dispositifs seront composés de magistrats (conseillers juridiques) installés au niveau des ministères et institutions économiques pour veiller au bon déroulement et respect des lois lors de l'octroi des marchés publics. Allô ! Ce n'est pas moi, c'est lui ! C'est bien beau, tout cela, mais là où il est attendu et en toute urgence l'intervention de la force de l'Etat, c'est au niveau de la “petite corruption” à grande échelle, vécue au quotidien un peu partout sur tout le territoire national. Un numéro vert anonyme, une vérification discrète et une enquête objective, seraient de simples outils, tout à fait à même de constituer une redoutable arme contre la corruption. Une opération à faire précéder par une large campagne de vulgarisation et de sensibilisation envers le grand public à travers tous les médias. Ça vaudra peut-être mieux que d'installer de supers structures budgétivores… à surveiller ! Ben oui, puisqu'il y aura encore de l'argent !