À l'occasion de la célébration du 8 Mars, une heureuse initiative a été prise en partenariat par les associations Fard et Bel Horizon qui ont organisé, samedi, une “balade sur les traces des femmes célèbres d'Oran”. Sur les places publiques, au détour d'une rue, d'un quartier ou à travers les pierres des monuments historiques jaillissent les récits de Aziza, épouse du prince almoravide, caïda H'lima, Juana la Locca ou encore, plus proche de nous, les sœurs Benslimane. Des prénoms de femmes qui se confondent avec l'histoire de la ville d'Oran. Ce sont là des histoires de femmes hors du commun, où le sang se mêle à l'amour, ou la beauté altière n'a d'égale que le courage et que la mémoire collective a oubliées, laissant le temps et les vents de la mer balayer et emporter ces empreintes du passé. Revisiter ce patrimoine à l'occasion de la célébration du 8 Mars est l'heureuse initiative, prise en partenariat, par les associations Fard et Bel Horizon qui ont organisé, samedi, une “balade sur les traces des femmes célèbres de l'Oran patrimonial”. Une soixantaine de personnes, dont de nombreux jeunes, ont ainsi sacrifié leur jour de repos pour aller flâner à la rencontre de ces femmes, à la rencontre de leur ville qui ne les attendait que pour mieux se raconter. La place du 1er-Novembre, déjà là une première représentation féminine, la statue de “la Victoire ailée”. En se rendant vers le palais du bey, l'évocation est celle de Badra l'Ottomane, l'épouse du dernier bey Hassan, personnage belliqueux, cruel, injuste. Femme déjà exceptionnelle, n'hésitant pas à monter à cheval, arborant un pistolet de cavalerie, elle s'ingéniera à atténuer les excès de son époux. “Elle venait en aide aux démunis et intercédait en leur faveur”, dira le président de l'association Bel Horizon, dans son rôle de guide d'un jour. Le bey, en 1830, abandonnant la ville et la livrant aux ennemis, s'en ira à La Mecque, suivi par son épouse Badra. Dans le petit pavillon du palais du bey, on se complaît à imaginer Badra, la généreuse, qui derrière les barreaux de ses fenêtres devait contempler la ville guettant les plaintes du petit peuple. Ou peut-être son regard se tournait au contraire vers les cimes du Murdjadjo, la montagne d'Oran, qui fût le théâtre d'un drame, d'une fin tragique, celle d'Aziza et de son époux, le dernier prince almoravide. Ce sont des écrits d'Ibn Khaldoun qui racontent comment “Tachefin, le dernier prince almoravide, voyant la déroute de ses troupes, tentera de fuir en pleine nuit”. Dans la pénombre, sous une pluie fine, il enfourche son destrier avec Aziza, montée sur la croupe, ne voulant pas la laisser derrière lui. Sortant discrètement du monastère où ils s'étaient réfugiés, ils se lancent sur les sentiers escarpés du Murdjadjo, frappant les flancs de l'animal. Une fuite qui leur sera fatale. Ils trouveront la mort tous deux dans une chute qui les précipite dans le vide. C'était en 1 145. De nos jours, l'endroit est encore connu pour s'appeler “le saut du cheval”. C'est encore une autre histoire d'amour fou et de pouvoir que celle de Juana la Locca, reine de Castille (1504-1555), qui a donné son nom à un lieu d'Oran, “les bains de la reine” (hammam Dadayoub). Les récits du règne de Juana la Locca, qui réussit à réunir tous les territoires d'Espagne sous un même sceptre, perdra son pouvoir par l'amour fou, maladif, qu'elle vouait à Phillipe le Bel. Son lien avec Oran est venu des séjours qu'elle effectua “aux bains de la reine” pour soigner une maladie de peau grâce aux eaux curatives de souffre. À une autre époque et un autre lieu d'Oran, c'est caïda H'lima, née vers 1859 à Sig, qui reste pour l'histoire d'Oran cette femme au caractère bien trempé et qui dirigea d'une main de fer les domaines de son époux et ce, bien après la mort de celui-ci, les faisant prospérer. Elle s'engagera encore dans nombre d'actions caritatives de l'époque, où elle devint une figure incontournable de la noblesse. Elle décédera en 1944. Son corps repose à la mosquée Cheïkh Benkabou de Tahtaha. Parce que plus proches de nous, on ne peut s'empêcher d'avoir une pensée pour les sœurs Benslimane, Houria, morte les armes à la main, en 1957, au quartier Maraval, et Sadïa, morte au maquis en 1961.