Le vice-président, Goodluck Jonathan, qui assurait l'intérim depuis le 9 février au Nigeria, a prêté serment après l'enterrement du président Umaru Yar'Adua, décédé des suites de problèmes cardiaques et une convalescence qui l'avait éloigné des affaires depuis novembre 2009. Son successeur doit mener à son terme l'actuel mandat présidentiel jusqu'en avril 2011. Ancien gouverneur issu du sud pétrolier, une première dans ce pays, huitième exportateur mondial de pétrole, rongé par la corruption et dont les élections sont régulièrement entachées de fraudes, Goodluck Jonathan a promis que son administration s'efforcerait d'exercer une bonne gouvernance, se concentrant essentiellement sur la réforme électorale, en vue de la prochaine présidentielle, et la lutte contre la corruption. Cinquième président civil de l'histoire du Nigeria, il aura donc à gérer plusieurs dossiers épineux, dont les plus urgents sont les conflits inter religieux entre le Sud chrétien et le Nord musulman, et la question du partage de la rente pétrolière. Le seul avantage pour le nouvel homme fort du pays le plus peuplé d'Afrique et son premier producteur d'hydrocarbures, c'est sa connaissance des dossiers. Voilà trois mois qu'il gère le pays en tant qu'intérimaire. Devant le gouvernement qu'il avait lui-même récemment formé, il a aussi fait de la distribution d'eau, de l'électricité et de l'éducation ses priorités. Après la lutte contre la corruption qui a gangréné le pays au point de menacer son unité géographique. Un bien vaste programme, quand on connaît la durée de son mandat, en vertu de la Constitution nigériane, il ne pourra présider le pays qu'un an environ, jusqu'à la fin du mandat de son prédécesseur. Et si l'envie lui venait à le proroger, les Etats-Unis, principal partenaire du Nigeria, viennent de lui fixer, pour ainsi dire, une feuille en lui rappelant le respect de la Constitution. Obama n'aime pas trop qu'on triture la Loi fondamentale et le fait savoir. Profitant de la totale absence de Yar'Adua sur la scène politique ces derniers mois, même lui n'avait pu le rencontrer, le nouveau président avait déjà repris en main certains dossiers. Le président de la commission électorale nationale, Maurice Iwu, déjà en place lors du scrutin très contesté de 2007, a ainsi été renvoyé en début du mois semaine dernière, un message fort de Goodluck Jonathan qui devra s'employer à donner confiance aux candidats et électeurs, pour éviter les contestations. Dans le secteur stratégique du pétrole, le Nigeria est le huitième exportateur mondial de brut, Jonathan a également procédé à des remaniements. Il y a un mois, il avait doté la puissante compagnie pétrolière nationale NNPC d'un nouveau patron, Shehu Ladan. Le ministère du Pétrole a aussi changé de main à la faveur d'un remaniement ministériel, en avril. C'est Diezani Allison-Madueke, une femme issue, comme Jonathan, de la région pétrolifère du delta du Niger, qui a hérité de ce portefeuille crucial. Goodluck Jonathan espère ainsi favoriser le retour à la stabilité dans cette région en proie à la coûteuse rébellion armée du Mouvement pour l'émancipation du delta du Niger (Mend), qui s'attaque notamment aux majors opérant dans le secteur. Mais au sein même de sa formation, le Parti démocratique du peuple (PDP), le nouveau président fait face à d'importantes divisions. Des dissensions publiques se sont fait jour malgré ses rappels à l'ordre. Les prochaines élections, déjà en ligne de mire, aiguisent les appétits. Selon la règle du parti dominant, chaque président doit être issu, en alternance, du nord et du sud du pays, et doit effectuer deux mandats. Un sujet d'autant plus sensible que les tensions entre les groupes issus du Nord et du Sud ont récemment donné lieu à des massacres dans la région de Jos dans le centre du pays. Le Nordiste Yar'Adua n'étant pas allé jusqu'au terme de son premier mandat, la logique voudrait qu'un autre candidat du nord soit investi lors du prochain scrutin. À moins que Goodluck Jonathan, poussé par ses partisans, ne prenne goût à la fonction.