Résumé : Les deux jeunes enfants de Yasmina moururent d'une rougeole. Effondrés, les parents décidèrent d'avoir d'autres enfants. Mais le malheur ne s'arrêta pas là… 67eme partie Une année passe, Yasmina tombe de nouveau enceinte. Elle était au sixième mois de sa grossesse, quand un autre malheur vint noircir son existence. Mouhoub venait de contracter une pneumonie. Cela faisait des jours que la fièvre ne voulait plus tomber. Yasmina le soigne de son mieux. On avait fait appel à plusieurs médecins, qui diagnostiquèrent le même mal. On prescrivit au malade plusieurs antibiotiques qui ne donnèrent rien. La fièvre refusait toujours de lâcher prise. Pis encore, parfois elle montait jusqu'à faire délirer Mouhoub. On essaya toutes les recettes de grand-mère qu'on connaissait, mais de ce côté-là aussi, on n'obtint aucun résultat. Au bout d'une dizaine de jours, Mouhoub rendit l'âme dans les bras de sa femme. 1934 – LE DECÈS DE MOUHOUB ET LA NAISSANCE DE MON PÈRE Après cet énième coup du destin, Yasmina perdit totalement le goût de vivre. Elle s'alita des jours durant et refusa de manger. Razika, qui ne la quittait plus, tenta de lui faire entendre raison. En vain. Yasmina demeurait des heures entières, allongée sur son lit à contempler le plafond. Elle revoyait sa jeunesse, son mariage et son voyage vers Marseille où l'attendait Mouhoub. Son amour pour ce dernier, qui n'avait cessé de grandir tout au long de ces années qu'elle avait vécues auprès de lui. Cet homme, bon, humble et généreux, avait su par sa simplicité la rendre heureuse. Son amour l'avait toujours motivée, et elle n'avait jamais eu à se plaindre de lui. Mouhoub avait été un exemple de courage et d'abnégation. Il avait lutté pour maintenir la tête hors de l'eau, même dans les situations les plus tragiques de sa courte existence. À 40 ans à peine, il avait quitté ce monde pour rejoindre ses cinq enfants sous terre. Yasmina n'avait plus de larmes pour pleurer. Le chagrin avait eu raison de son courage et de sa patience. Elle ne savait plus s'il faisait jour ou nuit, et se contentait de serrer ses trois enfants sur son sein. Malek et Farid, les deux aînés, aux portes de l'adolescence, réconfortaient leur mère de leur mieux. Seuls ces moments qu'elle passait avec eux lui mettaient un peu de baume au cœur. Mohamed, qui avait deux ans, babillait et faisait tout un tapage pour attirer l'attention de sa mère mais cette dernière se contentait à peine de le prendre dans ses bras. Souvent, elle passait une main sur les rondeurs de son ventre et pensait à ce bébé dans ces entrailles qui ne connaîtra jamais son père. Les larmes alors jaillissaient de ses yeux tel un torrent dévastateur. Est-ce une thérapie ? Mais Yasmina reconnaissait que ces larmes la soulageait un tant soit peu, elle qui pensait qu'elle ne pourrait plus jamais en verser une goutte. Deux mois passent. Dans la foulée, Malika, traumatisée par la mort de son neveu, s'alita et ne tarda pas à rendre aussi l'âme. Fadhéla rentre de France pour quelques jours, et malgré son chagrin, propose à Yasmina de s'installer dans la maison de sa défunte mère. Yasmina, n'ayant pus de ressources pour payer le loyer, accepta, à la grande déception de ses parents, qui auraient aimé la reprendre sous leur toit, elle et ses enfants. La jeune femme voulait lutter seule. Elle avait un devoir à accomplir envers son défunt mari et ses enfants. Elle repensait à la proposition de travail qu'elle avait reçue des années plus tôt à Marseille et se disait que cette fois-ci, Mouhoub avait raté le coche. S'il lui avait permis de travailler à cette époque, elle n'aurait eu aucun mal à reprendre une vie normale et à élever décemment ses enfants, sans avoir recours à qui que ce soit. Les économies de bout de chandelles de son mari lui permirent de faire face durant quelques jours à sa situation de chef de famille. Mais, elle savait qu'elle devrait se montrer encore plus ferme et plus courageuse pour faire face aux jours à venir. Quand mon père vint au monde, un certain jour de septembre de 1934, c'est-à-dire, trois mois après le décès de son père, Yasmina versa encore d'autres larmes. Cependant la vue du bébé l'avait quelque peu réconforté. Le petit garçon qu'elle tenait dans ses bras, ressemblait comme deux gouttes d'eau à son père, si bien qu'elle n'hésita pas à lui octroyer le même prénom. (À suivre) Y. H.