Pour le patron du Groupe Cevital, la diversité et la multiplicité des opérateurs, activant dans la production et la commercialisation des produits agroalimentaires, empêchent toute situation de monopole. Liberté : Cevital vient d'annoncer une baisse sur l'ensemble de sa gamme de production de produits agroalimentaires, alors que les prix des matières premières, notamment le sucre et l'huile connaissent une nouvelle flambée ; le Groupe va certainement rogner sur une partie de ses marges ? Issad Rebrab : Alors que le mois de Ramadhan, période de forte consommation, est utilisé par beaucoup pour spéculer et surenchérir sur les prix, nous avons décidé de faire valoir l'esprit de l'entreprise citoyenne qui se soucie du pouvoir d'achat du citoyen et essaie d'aider à sa préservation. Par rapport aux hausses des prix des matières premières sur les marchés internationaux, elles n'auront pas de répercussion dans la mesure où les matières premières utilisées actuellement ont été achetées il y a deux ou trois mois. En effet, nous avons été vigilants et avons anticipé pour nos approvisionnements. Malgré cela, les baisses de prix que nous avons consenties pour le mois de Ramadhan engendreront certainement des pertes de marges que nous comptons compenser par l'effet de volume, étant entendu que les ventes seront plus importantes durant ce mois-ci. Ces baisses seront-elles répercutées par les grossistes ? Quels seraient, logiquement, les prix des produits concernés par la baisse au détail ? C'est la loi de l'offre et de la demande qui est en jeu ; quand le marché est bien approvisionné, les produits disponibles en quantité et en qualité nécessaires, les commerçants, grossistes ou détaillants se font la concurrence et sont donc tenus de respecter les marges. Et c'est le cas pour les produits agroalimentaires que nous mettons sur le marché, donc il n'y a aucune raison pour que les baisses ne parviennent pas au consommateur final. Le ministère du Commerce a annoncé récemment le lancement d'une enquête sur le monopole sur le marché local, notamment celui des aliments de base comme l'huile, le sucre et la farine qui, selon lui, est à l'origine de la hausse des prix. Qu'en pensez-vous ? Comme chaque année, le ministère du Commerce intensifie ses efforts, particulièrement durant le mois de Ramadhan pour réguler les activités de commerce. Cevital, entreprise citoyenne, a toujours été dans ce combat pour moraliser la pratique commerciale et l'ancrer dans le professionnalisme. Maintenant, il faut bien savoir qu'un monopole renvoie à une situation juridiquement bien prévue ; c'est-à-dire le cas où une loi réserve la production et la commercialisation d'un bien ou d'un service à une seule entreprise à l'exclusion des autres. Or, dans le cas des produits que vous citez, les activités de production et de commercialisation sont totalement libres. Pour les huiles, il existe 11 raffineries qui couvrent à 300% les besoins nationaux et dégagent, par conséquent, des excédents pour l'exportation. Idem pour le sucre, avec 5 raffineries sur le territoire national qui couvrent les besoins nationaux à 200% et font également dans l'exportation. Pour la farine, ce sont des centaines de minoteries qui produisent à l'échelle nationale. Vous comprenez donc qu'il y a une concurrence rude, au point où certains opérateurs, dans le raffinage d'huiles, vendent à perte, empruntant aux techniques du dumping, pour se maintenir sur le marché. À mon sens, les hausses de prix peuvent s'expliquer d'abord par un renchérissement des prix des matières premières sur les marchés internationaux. Il y a également le poids de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) qui est à 17% pour les huiles et le sucre, ce qui me parait assez élevé, comparé à certains pays où elle n'existe pas (Tunisie, Egypte, Syrie) ou d'autres où elle est vraiment réduite (Maroc: 7%, France : 5,5%). C'est à ce niveau que nous appelons à rechercher les causes structurelles de ces hausses dans le cadre d'un travail concerté, auquel nous sommes prêts à apporter toute notre contribution.