L'Algérie, à l'instar des autres pays du monde arabo-musulman, pourrait être (re)colonisée. C'est l'une des projections émises par Malek Chebel, vendredi, lors de la soirée organisée à la librairie Socrate News. Selon lui, les menaces sont de plus en plus fortes et tout sera concentré sur les richesses des pays. “Déjà on parle de l'internationalisation de l'accès aux ressources naturelles, que ce soit le pétrole ou encore l'eau”. L'anthropologue précisa qu'“on va se retrouver avec un front de contestation” qui utilisera tous les moyens pour convaincre les opinions de la nécessité d'aller aux sources de ses ressources naturelles. Voulant relativiser l'état des lieux actuels, Malek Chebel dira : “Ce jour-là, l'islamisme sera très secondaire”. Les prévisions de celui qui est considéré comme un spécialiste de l'islam et du monde arabe sont vraisemblablement les prémices du nouveau Malek Chebel. Anthropologue, psychanalyste, philosophe, et provocateur selon certains, il compte mettre une nouvelle casquette à sa panoplie. “Je vais orienter mon travail sur la géostratégie”, a-t-il affirmé. En plus des menaces citées précédemment, Malek Chebel a également voulu donner une autre projection. Selon lui, “dans moins de trente années, l'islam sera la première religion monothéiste au monde”. Il précisera que le centre du monde musulman sera essentiellement en Indonésie et en Malaisie, annonçant en même temps l'effacement total du monde arabe, “même la langue arabe perdra de son influence au profit des langues des autres peuples musulmans” indiqua-t-il. Malek Chebel n'a pas hésité à lancer un appel : “Nous avons tout intérêt à nous ouvrir à l'islam en Asie”. Il faut espérer qu'avec ses nouveaux centres d'intérêt, la géopolitique et la géostratégie, le philosophe sera à l'avenir plus à l'aise sur certains thèmes qu'il avoue ne pas maîtriser. Malek Chebel a ainsi évité d'aborder la polémique entourant la construction d'une mosquée à New York, ou encore tout ce qui touche à la question palestinienne et à la situation en Algérie. La soirée a été également l'occasion pour lui d'aborder d'autres sujets à l'instar du fondamentalisme qui “n'est qu'une partie de notre histoire”. Constant dans ses positions, Malek Chebel rappellera que “c'est l'islamisme, et non l'islam, qui est le véritable problème”. Tranchant, il s'est prononcé contre le retour du califat qu'il définit même comme une hérésie. “Je suis partisan de l'Etat-Nation” en précisant que “les hommes doivent être gérés par des hommes”. Concernant la laïcité, l'auteur de “Dictionnaire amoureux des Mille et une nuits” (éditions Plon, 2010) a tenu à rappeler que la France est le seul Etat occidental laïque et que les autres pays “fonctionnent sous le régime d'un Etat laïque sans l'être réellement”. Les musulmans seraient même les précurseurs : “La dynastie abbasside (dynastie de califes sunnites arabes qui gouvernèrent le monde musulman de 750 à 1258, ndlr), qui a duré quand même cinq siècles, était quasiment laïque”. L'invité d'Algérie Socrate News a aussi abordé de nombreuses thématiques. Ainsi en évoquant l'identité, Malek Chebel estime que c'est un des sujets les plus compliqués “en plus de la sexualité et de la religion”. L'auteur de Kama-Sutra arabe (éditions Fayard, 2006), ne s'est pas toutefois trop étalé sur le tabou de la sexualité dans le monde musulman, Ramadhan oblige ! Le psychanalyste s'est juste contenté de relater sa période estudiantine et sa découverte de la gynécologie en exposant avec passion ses… “touchers”.