Lors d'une rencontre organisée à Skikda se rapportant à la problématique de l'environnement en général, le nom de la ville balançait entre deux toponymes malaisément forgés. Le premier nom, définitivement installé pour indiquer la ville, renvoie à l'ère coloniale où les noms de lieux devaient suivre une connotation du franglisme. Toute la cartographie du pays (civile et militaire) est faite et établie ainsi au titre d'héritage dès l'indépendance. Pour cette ville, cela a donné l'appellation de Skikda. En deuxième position et certainement pour donner une réplique nationaliste, voire nationalitaire, une intervenante a tenté une correction arabisée et totalement volontariste. Sa proposition ressemblait plus à une esquive en nommant la ville sous le drôle et non moins laborieux nom de Soukaykida. Cette forme forgée dans les labyrinthes de l'arabisation au forceps de l'environnement est tellement flagrante qu'elle n'a pu se maintenir dans la mémoire. Cela nous rappelle l'épisode rocambolesque de nos commentateurs qui, lors de la retransmission de matchs d'une Coupe du monde de football, se sont aventurés à défigurer les noms de certains pays en les nommant en arabe abusivement par une traduction littérale. Ainsi, la ville de Guadalajara, au Mexique, a été déformée en Oued El-Hadjara. La Côte d'Ivoire s'est vu changée en Sahel El-Hadj. Même le joueur Hadji, dont la lettre “h” est muette, a été exagérément transformé en Hadji avec un “h” très emphatiquement et consonantiquement prononcé pour le convertir, malgré lui, à un pèlerin, etc. Nous avons encore en mémoire les plaintes faites par les chancelleries des pays concernés auprès de notre ministère des Affaires étrangères et la prononciation originale a été rétablie. Pour ce qui est du nom Skikda, il est issu du mot originaire amazigh : isikdan, qui signifie les guetteurs. Dans isikdan, nous notons le verbe siked, qui veut dire voir, observer et, par extension de sens : surveiller. En effet, l'imposante belle ville côtière de Skikda se dresse au pied d'une grande et haute colline stratégique d'où, historiquement, l'œil humain pouvait scruter, sous une surveillance stricte, les mouvements des bateaux. Du haut de cette colline, le regard balaye le grand arc de la mer Méditerranée. L'arc qui se perd à l'horizon dépasse la simple baie d'un rivage. Le toponyme Soukaykida a beau se torsader dans les formes linguistiques ou même langagières de la langue arabe, c'est là une vaine et inutile tentative. A. A. ([email protected])