Avec Paul Biya ça sera d'autant plus difficile que ce dernier n'a pas caché sa volonté de passer outre la Constitution de son pays pour rester au pouvoir au-delà des mandats réglementaires. Paul Biya, le chef de l'Etat camerounais est accusé de violation de la loi sur l'élection des députés. Le Parlement de son pays est amputé de sept députés, décédés en cours de législature issue des élections de 2007, et le Président n'a pas organisé des élections partielles, comme l'y contraint la loi. Les circonscriptions sans députés seraient des fiefs de l'opposition. L'auteur de la requête contre le président de la République, Abba Aboubakar, président du parti politique de l'opposition la Révolution camerounaise du peuple uni, a introduit sa demande auprès de l'Union africaine, le 20 septembre dernier chez le secrétaire de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples basé à Banjul, la capitale de la Gambie. Ladite commission, annoncée en son temps et en grande pompe par l'UA s'était déclarée comme l'institution judiciaire panafricaine au service du droit et des peuples africains. La plainte, selon son auteur, se fonde précisément sur l'article 13 de la charte de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples qui stipule que “tous les citoyens ont le droit de participer à la direction des affaires de leur pays”. Un principe qui doit gêner l'UA prise à ses propres textes. Et, le plaignant n'a pas enfoncé le clou s'en tenant aux impacts économiques de l'absence du député pour une circonscription donnée. Sans représentants au Parlement, les sept circonscriptions se sont retrouvées sans budgets de développement locaux. Abba Aboubakar a mis une pierre dans la chaussure de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples qui doit statuer sur la recevabilité de cette requête et, en cas d'approbation, procéder à un examen au fond de la plainte. Une session est annoncée pour novembre prochain. Mais l'UA oserait-elle discréditer le président Paul Biya qui a déjà rejeté la plainte. Abba Aboubakar avait fait une démarche similaire restée sans suite auprès de la Cour suprême du Cameroun. Il explique sa récidive par le fait que la Commission africaine est le dernier recours lorsque les droits du peuple s'enlisent dans l'inaction gouvernementale, après avoir constaté que la Cour suprême du Cameroun est inféodée à l'exécutif, constituant, à ses yeux, l'élément essentiel de passe-droit dans son pays. Il est à rappeler que la procédure de saisine de la Commission est établie à travers la charte qui la constitue et que les Etats membres ont ratifiée. C'est normalement une institution judiciaire internationale qui a un pouvoir étendu sur les juridictions nationales pour statuer souverainement. Un vrai casse-tête pour l'Union africaine qui a adopté des règlements démocratiques mais dont l'application reste incertaine. Avec Paul Biya ça sera d'autant plus difficile que ce dernier n'a pas caché sa volonté de passer outre la Constitution de son pays pour rester au pouvoir au-delà des mandats réglementaires. Les prochaines présidentielles c'est l'année prochaine et sa volonté de se représenter ne fait l'ombre d'aucun doute. Le président camerounais résiste même aux pressions des Français qui veulent lui imposer la création d'un poste de vice-président de la République. Paris pour qui le Cameroun fait partie de la Françafrique, pressent-il un danger à l'horizon pour exiger de Paul Biya une réforme de la Constitution en ce moment ? Aux yeux des Français, la personnalité qui occupera ce poste pourra être considérée comme le dauphin de fait au cas où le président de la République pour une raison ou une autre est incapable d'exercer ses prérogatives. Or, la Constitution camerounaise a prévu cette situation. En cas d'empêchement, l'intérim est assuré par le président de l'Assemblée nationale. Et quand Nicolas Sarkozy demande à Paul Biya de créer ce poste de vice-président, c'est qu'il a son idée derrière la tête, une idée sur la personne à y placer.