Après la suspension de la campagne électorale le mois dernier et le report sine die du second tour de l'élection présidentielle en Guinée initialement fixé au 18 juillet, puis au 19 septembre, conséquence de violences entre les partisans des deux candidats en lice, les Guinéens sont finalement appelés aux urnes le 24 octobre prochain. Cellou Dalein Diallo de l'Union des forces démocratiques de Guinée et Alpfa Condé du Rassemblement du peuple de Guinée devront se disputer les suffrages de 4 224 272 électeurs inscrits sur les listes électorales. Diallo a obtenu autour de 43% à l'issue du premier tour de scrutin, contre 18% au profit de son outsider, l'opposant historique Alpha Condé. Mais les résultats ont été très fortement contestés et le président de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) a été inculpé et condamné à de la prison ferme pour manipulation électorale, avant de décéder à Paris d'une grave maladie. La désignation d'un nouveau président de la commission a été au centre de sérieuses batailles, l'honnêteté du scrutin étant en jeu. La désignation de ce nouveau président, fortement contestée par le candidat en pôle position Dalein Diallo et l'annonce de la date du second tour n'auront finalement été qu'un soulagement de courte durée. Une plainte a été déposée devant la justice le camp de l'ancien Premier ministre Diallo contre le nouveau président de commission, accusé de vouloir favoriser Alpha Condé et d'avoir fait disparaître 109 procès-verbaux lors du premier tour de l'élection. Les alliés politiques de Diallo menacent de boycotter le second tour si l'actuel président de la Ceni est maintenu à son poste et ce dernier, récusant toutes les accusations, refuse toute idée de démission. L'intéressé assure que les accusations formulées à son encontre sont sans fondements et auraient pour soubassement rien moins que des considérations ethniques, lui-même n'étant pas peul comme son accusateur. La situation est donc loin de se clarifier et l'ombre d'un nouveau report plane sur ce second tour problématique. Pour tenter de dénouer la crise, le général Konaté, président de la transition, a nommé jeudi comme membre de la Ceni l'archevêque de l'Eglise anglicane de Guinée, un religieux très respecté dans le pays, de même qu'un célèbre avocat du barreau de Conakry. Les deux nominations ont été faites sur proposition de la société civile. Le même décret a crée “un comité de suivi et d'évaluation des actes préparatoires du second tour”, présidé par Blaise Compaoré, le président burkinabé, qui a été jusqu'ici le médiateur dans la crise guinéenne. Devant le risque de voir le second tour compromis et, à travers lui l'ensemble du processus de démocratisation de la Guinée, la France et les Etats-Unis, qui ont des intérêts bien compris dans le pays, sont montés au créneau. Les ambassades des deux puissances à Conakry ont appelé au maintien de la date du 24 octobre, “sans aucune possibilité de report”.