Liberté : Dans quels cas recourt-on aux écoutes téléphoniques ? Me Khaled Bourayou : Tout d'abord, il convient de considérer que les écoutes téléphoniques sont un procédé qui consiste à intercepter et à écouter une correspondance par télécommunication. Les pays libéraux ont réglementé d'une façon stricte l'utilisation de ce procédé. Les écoutes téléphoniques peuvent être décidées soit par le juge soit par la loi. Dans le premier cas, c'est le juge lui-même qui, pour des raisons d'enquête, autorise les écoutes par décision motivée. Les écoutes sont également autorisées par la loi quand il s'agit, notamment, de secret de défense et quand il s'agit d'interception de sécurité, c'est-à-dire des interceptions émises par la voie des télécommunications ayant pour objet de rechercher des renseignements intéressant la sécurité nationale, la sauvegarde des éléments essentiels du potentiel scientifique et économique du pays, la prévention contre le terrorisme ou en matière de criminalité et de délinquance organisée. Les interceptions sont autorisées par décision écrite et motivée du Premier ministre. Cette autorisation est donnée sur proposition écrite et motivée du ministre de la Défense, du ministre de l'Intérieur ou du ministre chargé des douanes. La durée maximale d'interception ne peut pas dépasser les quatre mois. La décision du Premier ministre est portée à la connaissance d'une commission nationale chargée du contrôle des interceptions de sécurité des correspondances interceptées. Seuls les renseignements en relation avec l'un des objectifs de l'interception de sécurité peuvent faire l'objet d'une transcription. Cela veut dire que si, dans la discussion, la personne qui est mise sur écoute parle de sa vie privée ou d'un sujet n'ayant pas de rapport avec l'objet de l'interception, ce passage n'est pas transcrit. L'enregistrement est détruit sous l'autorité du Premier ministre. Aussi, cette commission est une autorité administrative indépendante, elle est présidée en France par une personnalité désignée par le président de la République pour une durée de six ans. Le président de la commission peut contrôler la légalité de la décision. Si le Président constate que cette interception s'est faite au mépris de la réglementation, la commission peut adresser au Premier ministre une recommandation tendant à ce que cette interception soit interrompue. C'est dire la rigueur avec laquelle on doit veiller à l'application de cette réglementation autorisant les écoutes. Le troisième cas de figure, c'est lorsque une personne est victime d'un harcèlement par téléphone et qu'elle demande à être mise sur écoute pour une durée déterminée afin d'identifier la personne qui exerce sur elle ce harcèlement. Que prévoit la réglementation nationale en matière d'écoutes téléphoniques ? Il convient de souligner que la constitution garantit et protège, dans son article 39, la vie privée des personnes et protège les correspondances. En Algérie, la loi n° 2000/03 du 5 août 2000 (lire en page 2, ndlr) fixant les règles générales relatives aux postes et télécommunications prévoit, dans ses dispositions pénales et notamment l'article 127, la sanction de toute personne autorisée à fournir un service de communication et tout employé par des opérateurs de réseaux publics de télécommunications qui, dans le cadre de l'exercice de leurs fonctions et en dehors des cas prévus par la loi, violent de quelque manière que ce soit le secret des correspondances émises, transmises ou reçues par voie de télécommunications, ou en ont donné l'ordre, ou ont aidé à l'accomplissement de ces tâches. La sanction est prévue par l'article 137 du code pénal. Elle est de 3 mois à 5 ans d'emprisonnement. En définitive, je dirais que toute écoute qui se fait au mépris de la loi est une atteinte sérieuse à la vie privée, c'est aussi une atteinte grave au secret de correspondance. C'est un abus d'autorité caractérisé. Quels sont les recours du citoyen quand il découvre qu'il est mis sur écoute ? Il est d'abord très difficile au citoyen de prouver qu'il est mis sur table d'écoute. C'est à l'administration de garantir la sécurité des personnes et des biens. Ce n'est pas à la personne de prouver quoi que ce soit, mais c'est à la loi de le protéger. N. M.