Dans son intervention, le représentant du ministère de l'Agriculture et du Développement rural a reconnu que “la sécurité alimentaire est certainement l'une des questions que nous aurons à étudier sur les 2 ou 3 générations à venir”. L'Association algérienne d'universitaires et de chercheurs en sciences sociales (AADRESS) a organisé, hier, un colloque international au Centre national d'études et d'analyses pour la population et le développement (Ceneap, Alger), autour de la sécurité alimentaire et du lien social, en hommage à l'un des rares spécialistes de l'agriculture en Algérie, Hamid Aït Amara, décédé le 11 novembre 2009 à l'âge de 73 ans. Cette manifestation, qui durera deux jours et à laquelle ont pris part sa veuve et deux de ses enfants, Malik et Yasmine, a été placée sous le signe de “la perpétuation de l'effort de réflexion et de recherche” du défunt, qui était à la fois juriste, sociologue et économiste de renom, initiateur, membre fondateur et premier président de l'AADRESS. La projection de la dernière conférence publique que Hamid Aït Amara avait animée en 2005, à Paris, a aidé à mieux cerner cet “intellectuel exemplaire, intransigeant sur les principes et fidèle à ses engagements pour une Algérie de progrès et de justice”, surtout à saisir le pourquoi de son intérêt aux questions déterminantes de l'agriculture et de la sécurité alimentaire, deux problématiques qui constituent des défis pour le monde de demain. Ainsi, en 2005, Aït Amara pressentait déjà que la crise alimentaire “est appelée à s'approfondir” dans le monde. Il constatait, concernant l'agriculture algérienne, que le “ratio de terre cultivable” de 0,10 ha par habitant était “très faible”, justifiant ainsi cet état de dépendance alimentaire. Un état qui entraînerait alors de plus en plus de pression sur les plans économique et social. Dans ses projections 2015, le chercheur avait d'ailleurs relevé que la facture de l'importation serait “extrêmement élevée”, variant entre 7 et 8 milliards de dollars. Plus encore, cette importation par l'Algérie portait pratiquement sur tous les produits alimentaires de base, précisait-il. Aussi, une question revenait dans la bouche du défunt : “Est-ce qu'on aura toujours l'argent nécessaire pour importer et acheter de quoi manger ?” Ce constat nous ramène à la réalité d'aujourd'hui et, plus particulièrement aux perturbations que connaît la filière du lait, dont les conséquences sont pesantes pour les consommateurs, notamment les franges les plus nécessiteuses dans la société. La rencontre d'hier, comme on le voit, a jeté un éclairage salutaire, mais aussi inquiétant, sur les conséquences des politiques, souvent exigées, notamment dans les années 1990, par les institutions financières internationales. Elle a, en outre, donné un aperçu sur la nécessaire vision lointaine dans le domaine agricole, en liaison avec les enjeux actuels et les risques que pose la question alimentaire de nos jours. Dans son intervention, le représentant du ministère de l'Agriculture et du Développement rural a reconnu que “la sécurité alimentaire est certainement l'une des questions que nous aurons à étudier sur les 2 ou 3 générations à venir”. Il a également tenu à rendre hommage à Hamid Aït Amara, à “ses idées” et “en tant qu'intellectuel éclairé qui a produit bon nombre d'analyses”. De son côté, l'actuel président de l'AADRESS, Mohamed Benguerna, a estimé qu'il est grand temps d'organiser des “rencontres de mémoires et de témoignages” pour permettre “une reconstitution de l'histoire universitaire et de la recherche en Algérie”. Pour le directeur de recherche (Cread), il est important d'expliquer “les problèmes des générations d'universitaires”, mais aussi de transmettre leur savoir et leurs recherches, voire même leurs interrogations. “Il faut dire que le système universitaire et de recherches a une histoire spécifique, marqué par des expériences fort intéressantes, qui ne demandent qu'à être accumulées, capitalisées et valorisées”, a indiqué M. Benguerna. Par ailleurs, ce dernier a indiqué que le moment est venu pour “donner la parole aux pionniers qui ont pris en charge l'université dans les années 60”.