Y a-t-il eu manipulation lors des dernières émeutes qui ont secoué le pays ? S'il faut sans doute se garder de tirer des conclusions hâtives, il reste que pour nombre d'observateurs des zones d'ombre entourent le vent de révolte qui a soufflé pendant près d'une semaine sur de nombreux endroits du pays. La ligue algérienne pour la défense des droits de l'homme (LADDH), aile dirigée par Me Zehouane, parle, à titre d'exemple, “d'indices troublants” sur lesquels la “lumière doit être faite”. “Il faut que la lumière soit faite sur la thèse de la provocation et de la manipulation. Il faut instituer une commission d'enquête nationale d'autant que certains ont avancé des indices troublants”, a indiqué hier Me Hocine Zehouane lors d'une conférence de presse tenue à Alger. L'avocat, qui justifie le retard mis par son organisation pour réagir aux évènements par la nécessité de “prendre de la distance pour recueillir toutes les données”, a également demandé “à prendre en considération le contexte de l'explosion sociale et répondre à ceux qui accusent les jeunes de pilleurs”. Quant aux griefs retenus par certains contre la société civile, accusée de démission, il a égrené les multiples entraves dressées devant les associations et les partis dans l'exercice de leurs activités. Dans son analyse de la genèse des évènements, Me Zehouane estime qu'“il faut aborder le problème à travers la stratification de la société”. “Il y a un fondement dans les structures de la société, les évènements ne sont pas tombés du ciel”, dit-il. “Depuis 1988, l'Algérie est entrée dans un processus émeutier (…) le système politique, tel qu'il est, ne permet pas la régulation pacifique des tensions sociales et la rente pétrolière paralyse complètement le pays”, relève t-il encore. En outre, il soutient que “l'assistanat et la coercition” ne tiennent plus, que des contradictions sociales “ont émergé” et qu'enfin “le recours au désordre permet aux tenants du pouvoir de rester”. “Nous sommes une société bloquée”, a-t-il affirmé. Dès lors, pour rendre espoir à la jeunesse et éviter d'autres secousses, Me Zehouane préconise un vaste plan national d'éradication de la détresse. “Nous revendiquons l'établissement d'un standard minimum garantissant le droit à la formation et à l'éducation ; la protection sanitaire et le droit au travail et au logement.” Et sur le plan politique, il préconise “une refondation constitutionnelle”. “Mais, je suis contre l'idée de la constituante”, a-t-il toutefois précisé en invoquant un risque d'une assemblée qui aurait à établir une Constitution antidémocratique. La sortie de crise est possible pour peu qu'il y ait volonté, à ses yeux. Faute de quoi, d'autres séismes ne sont pas à exclure, laisse-t-il entendre. “Nous exhortons tous ceux qui détiennent le pouvoir décisionnel d'anticiper sur l'éventualité d'évènements fâcheux et incontrôlables.”