Venus assister au procès de Journalistes Dilem et Abrika embarqués devant le tribunal Il est 10 heures, mercredi matin. Au niveau du tribunal d'Alger, rue Abane-Ramdane, un dispositif sécuritaire impressionnant est déployé. La rue est “décorée” de bleu. Cinq grands fourguons de CNS sont stationnés, des 4x4 Toyota, en plus des voitures banalisées. Les citoyens sont interdits d'entrée à la salle d'audience. Il est même exigé un ordre de mission aux journalistes. Le commissaire est catégorique : “Sans ce document, vous ne pourrez pas entrer. La carte professionnelle ne suffit pas”. Le directeur du Matin, M. Benchicou, et le caricaturiste Ali Dilem du journal Liberté arrivent pour assister au procès. Le commissaire en civil devant l'entrée refuse l'accès à M. Benchicou, et autorise notre caricaturiste à y accéder. Ce dernier refuse d'entrer seul. Interrogé sur cette sélection, l'officier rétorque : “Les ordres sont les ordres.” Vingt minutes après, soit à 11 heures, Belaïd Abrika, porte-parole du mouvement citoyen, accompagné d'une dizaine de délégués, arrivent à bord de deux voitures. Les policiers renforcent leur présence à l'entrée du tribunal. Abrika se dirige vers l'entrée mais il en est empêché violemment et est conduit de force vers le trottoir d'en face. “Pourquoi me traitez-vous de la sorte ? Je suis citoyen algérien et c'est mon droit le plus absolu d'assister à ce procès public. Vous êtes des hors-la-loi !”, lance le délégué du mouvement citoyen. Devant la brutalité des policiers, Ali Dilem intervient : “C'est quoi ce comportement ? C'est un Algérien comme vous et moi. Quel est son tort ? Pourquoi le traitez-vous ainsi ? Ce n'est pas normal !” Avant même de terminer sa phase, un officier en civil s'acharne sur sa personne et l'embarque ainsi qu'Abrika dans une voiture Toyota, direction le commissariat de la rue docteur Saâdane. L'ancien commandant de l'ALN, Yaha Abdelhafid, qui a tenté de s'interposer, se voit lui aussi embarqué avec quatre délégués du mouvement citoyen. Les policiers n'y sont pas allé de main morte. Les interpellés ont été relâchés 40 minutes après, sans pour autant pouvoir rejoindre l'audience. À l'ouverture de l'audience, les trente avocats, venus même de Tizi Ouzou, ont dénoncé le placement du tribunal en état de siège : “C'est une atteinte aux droits de l'Homme et, en tant qu'intellectuels, nous refusons de plaider dans ces conditions car nous sommes les premiers à les défendre. Il n'y avait pas autant de policiers quand des terroristes ont été jugés.” Les avocats ont réclamé la restitution de la carte de presse de la journaliste de l'APS Fatma-Zohra Bellazoug confisquée par les policiers lors de son arrestation. D'après les robes noires, cette carte est “une pièce qui manque dans le dossier”. Par conséquent, ceux-ci refusent de plaider. Devant le palais de justice, les délégués et tous ceux qui ont été interdits d'accès, dont le mari de la journaliste de l'APS et le directeur du Matin, attendaient le verdict. Après en avoir pris connaissance, les présents se sont dispersés et les délégués des archs ont improvisé une marche symbolique de 100 mètres en scandant des slogans hostiles au pouvoir. M. B.