Les efforts des opérateurs privés pour ranimer le marché financier ont connu, dans la période la plus récente, des fortunes diverses. Après l'échec relatif de l'emprunt obligataire de Dahli, la réussite de l'ouverture du capital d'Alliance Assurances, réalisée à la fin de l'année dernière, a peut-être donné enfin le signal du réveil et d'un nouveau départ pour la Bourse d'Alger . Cela semble, en tout cas, être le point de vue du président de la Cosob, M. Ismaïl Noureddine, qui annonce une grande réforme du marché financier en 2011. Une réforme qui gagnerait sans doute à s'inspirer de l'exemple de la Bourse de… Tripoli. On se souvient que le deuxième assureur privé algérien avait lancé, le 2 novembre dernier, une souscription pour lever auprès du public 1,4 milliards de DA (14 millions d'euros). Cet appel public à l'épargne était destiné à permettre à l'entreprise de tripler ses fonds propres et de remplir ainsi les conditions de capital minimum fixées par le régulateur algérien à l'échéance de fin 2011. Au terme de cette opération clôturée avec succès au bout d'un mois, l'assureur devrait rejoindre les deux seuls titres déjà cotés à la Bourse d'Alger : l'hôtel Aurassi et le groupe pharmaceutique Saidal dont le capital reste, dans les deux cas, majoritairement contrôlé par l'Etat algérien.. UNE OPERATION BIEN MENEE Les dirigeants d'Alliance Assurances n'ont rien négligé pour assurer le succès de cette opération. À partir du début du mois d'octobre, Hassan Khelifati et son staff ont sillonné le pays. Un road show qui les a conduits dans plus de 15 villes à la rencontre des chefs d'entreprise, des banquiers et du grand public qui ont souvent répondu présent. La notice visée par la Cosob et disponible dans l'ensemble du réseau bancaire détaillait le plan de développement de l'entreprise qui s'appuiera d'abord sur le renforcement de la maison mère, Alliance Dommages, dont le chiffre d'affaires a atteint près de 3 milliards de DA en 2009. Il prévoit, en outre, la création d'une joint-venture dans les assurances de personnes avec un partenaire européen, ainsi que d'une société de capital risque dont l'objectif sera de soutenir des projets dans le secteur de la santé, également en association avec un partenaire international. LES AUTRES CANDIDATS DANS L'EXPECTATIVE Pendant ce temps, les candidats, plus ou moins déclarés à une entrée en bourse au cours des dernières années, ont suivi l'opération avec l'intérêt qu'on peut deviner. Parmi ces derniers, les noms qui reviennent le plus souvent sont ceux de l'établissement financier Maghreb Leasing Algérie (MLA), du groupe NCA, spécialisé dans les boissons gazeuses, de l'opérateur téléphonique Nedjma, ou encore du groupe Cevital, première entreprise privée du pays qui envisage l'introduction en Bourse de sa filiale CBS, spécialisée en communication. Ils auront tous contracté une dette à l'égard du patron d'Alliance Assurances qui a joué crânement son rôle de pionnier et se déclare optimiste “Pas seulement pour notre entreprise, je suis également optimiste sur le fait que cette opération va démystifier la Bourse et envoyer un signal positif à de nombreux opérateurs. Nous, les entreprises privées, et particulièrement les groupes importants, avons la responsabilité historique d'aller de l'avant et de créer cette dynamique.” UNE REFORME EN 2011 Une hirondelle ne fait pas le printemps et la situation actuelle du marché financier est jugée intenable par le président de la Cosob. Pour Ismaïl Noureddine, le marché est caractérisé par une “lassitude devant la longue attente d'introduction des entreprises à la cote et la relance de la Bourse d'Alger”. Le bilan de l'activité de la Bourse se caractérise, depuis sa naissance, par l'émission d'une trentaine de lignes obligataires de sociétés publiques et privées, dont 5, accessibles au grand public, sont cotées en Bourse. Cette institution financière n'est forte pour l'heure que de la cotation de 22 lignes OAT (obligations assimilables du Trésor) . La frilosité des opérateurs, par manque de transparence ou par immaturité managériale, est mentionnée comme un facteur expliquant la léthargie du marché. Mais l'Etat a déserté également le terrain, car le cadrage juridique et les procédures réglementaires sont inadaptées. “Les dispositions régissant le marché financier nécessitent inévitablement une révision de fond en comble”, suggère le président de la Cosob. Il regrette sur sa lancée le fait que des centaines d'entreprises publiques ont été privatisées entre 2003 et 2008 en dehors de la Bourse d'Alger. C'est un mauvais choix, estime-t-il, car cette privatisation aurait pu conférer une assise financière et une transparence importante à la Bourse. Autres carences : “Le marché secondaire est strictement illiquide, le code légal et réglementaire est inachevé, les services d'investissement nécessaires au marché sont inexistants, l'organisation et le fonctionnement actuel du marché financier manquent de consensus et de schéma directeur”, déplore encore le président de la Cosob. C'est pourquoi, juge-t-il, un débat national sur le marché financier algérien s'impose. “Il s'agit d'un choix national et politique.” Il annonce une réforme pour 2011 qui s'étalera sur deux années. L'objectif premier étant de parvenir à “sculpter” un business modèle pour le marché financier algérien et le doter d'un cadre juridique approprié.