Au bout de deux semaines d'une grève illimitée, les étudiants de l'Ecole normale supérieure (ENS) de Bouzaréah ont décidé d'occuper les lieux (l'école), jour et nuit, jusqu'à ce que leur revendication soit prise en charge. Certains parmi eux envisagent même d'entamer une grève de la faim comme dernier recours. Une pétition signée par plus de 4 000 étudiants fait le tour de toutes les écoles normales du pays, notamment à Constantine et Oran. Rassemblés hier devant l'administration, les étudiants ont scandé en chœur : “Stop au mépris (la hogra) de l'étudiant.” “L'éducation et l'enseignement sont la base de la société.” “Ne bardez pas notre avenir.” Leur plate-forme de revendications se résume au maintien du concours d'accès au magistère sans condition pour les étudiants du système classique, l'équivalence aux étudiants ayant un bac + 5 à un mastère 2, un bac + 4 à un mastère 1 et un bac + 3 à une licence, l'inscription à la thèse de doctorat LMD sous concours national, le changement de l'intitulé PEF (professeur de l'enseignement fondamental) à PEM (moyen) et l'amélioration des conditions sociopédagogiques. Mais, depuis peu, ils ont enrichi cette liste de revendications en y ajoutant le départ du directeur de l'ENS de Bouzaréah. Organisés en coordination nationale des collectifs des étudiants autonomes de l'ENS, ils donnent un ultimatum jusqu'à dimanche prochain au ministre de l'Enseignement supérieur pour ouvrir le dialogue. Ils se disent décidés à durcir encore plus le mouvement de contestation si rien n'est fait jusque-là. “Nous ne voulons pas de promesses mais du concret”, disent-ils. Concernant la dernière revendication – qui a été ajoutée hier – à savoir le départ du directeur de l'ENS de Bouzaréah, les étudiants de cette école se disent déterminés à occuper les lieux jusqu'à ce qu'il soit remplacé. Au-delà de sa gestion pédagogique au sein de l'école, ils lui reprochent d'avoir “manipulé” certains étudiants ainsi que l'opinion publique afin de casser leur mouvement de contestation. “Ce matin, le directeur a contacté une certaine presse, et notamment l'ENTV, pour venir filmer la reprise des cours à l'ENS et il a même préparé une mise en scène avec certains étudiants adhérents à l'Ugel qui ont parlé au nom du collectif des étudiants autonomes”, raconte Tayeb A., membre de ce collectif, rencontré hier à l'école. Tayeb poursuit en précisant que “les déclarations enregistrées par l'ENTV sont diffamatoires”, et assure qu'“aucun étudiant n'a repris les cours”. Selon plusieurs témoignages, des dépassements ont eu lieu entre les étudiants du collectif et ceux de l'Ugel. “Lorsque nous avons voulu intervenir pour dénoncer ce qui se passait, certains étudiants affiliés à l'Ugel ainsi que le directeur ont riposté en nous chahutant, insultant et qualifiant de tous les noms d'oiseau”, témoigne Aïcha, étudiante de l'ENS de Bouzaréah. Elle souligne que ces derniers ainsi que le directeur de l'école ne sont pas à leur première dérive. “Il y a quelques jours, le directeur nous a carrément insultés”, précise-t-elle. Sa copine Souad s'interroge : “Je ne comprends pas le comportement de ces adhérents d'organisations semi-officielles qui tentent de casser notre mouvement. Pourtant, ils sont aussi touchés par les mêmes problèmes.” Une voix s'élève de loin et lui répond : “Ils sont payés par l'administration pour casser la contestation comme cela se fait partout maintenant.” Rappelons qu'à l'université de Bouzaréah, ce sont les adhérents de cette même organisation qui ont, là aussi, usé de violence pour casser la grève illimitée décrétée par le collectif des étudiants autonomes.