Difficile de ne pas faire de rapprochement entre les mesures du ministre français de l'Intérieur et les exigences du Front national, car les accords de Schengen restent en effet une des cibles privilégiées du parti de Marine Le Pen, même si la suspension des modalités Schengen est qualifiée de provisoire, le temps que sa défaillance systémique à une frontière extérieure de l'UE soit réglée. La France envisage de rétablir les contrôles de papiers aux frontières, en suspendant les accords de Schengen. La mesure se veut une réponse à l'Italie, jugée trop permissive à l'égard des harragas venus de Tunisie. Mais, c'est surtout un message aux électeurs du Front national, dont la chef Marine Le Pen réclame le démantèlement du dispositif frontalier européen et le rétablissement des frontières nationales de la France. La fille Le Pen a fait une virée remarquée à Lampedusa, l'île italienne où débarquent les barcasses provenant de Tunisie et même de Libye. Et quelques jours plus tard, l'Elysée annonce cette mesure ! Après avoir augmenté les effectifs des forces de l'ordre à la frontière avec l'Italie et suspendu à plusieurs reprises les trains en provenance de Vintimille, ville frontalière italienne. Difficile de ne pas faire de rapprochement entre les mesures du ministre français de l'Intérieur et les exigences du Front national (les accords de Schengen restent en effet une des cibles privilégiées du Front national), même si la suspension des modalités Schengen est qualifiée de provisoire, le temps que sa défaillance systémique à une frontière extérieure de l'UE soit réglée. La “défaillance” en question, ce serait celle de l'Italie. La France lui reproche de ne pas faire grand-chose pour empêcher les harragas de traverser la frontière franco-italienne. Et même d'encourager leur passage, en leur attribuant des titres de séjour provisoires. Ces titres permettent à un étranger, en effet, une fois accueilli par l'un des 25 Etats de l'espace Schengen, de circuler librement de l'un de ces pays vers l'autre. Concrètement, Sarkozy va rétablir le contrôle systématique aux frontières avec ses voisins de l'UE. Marine Le Pen n'a cesse de rappeler que seule une sortie de la France de l'espace Schengen permettra à la France de maîtriser ses frontières, enjoignant Nicolas Sarkozy de cesser de se soumettre au diktat migratoire européen. Chose faite. La mesure envisagée par l'Elysée va dans le même sens, même si elle est moins radicale. Mais avec le président français, tout est dans la nuance concernant sa convergence avec le Front national. À ce propos, Marine Le Pen, qui n'arrête pas de pousser son exigence toujours plus haut, sachant que Sarkozy est sur ses traces, a invité Guéant, le ministre de l'Intérieur de ce dernier, à récupérer sa carte du Front national ! Tout est dit sur les amours entre les deux parties. Ainsi se comprennent mieux et s'apprécient à leur juste valeur les “bourdes” droitières, racistes et xénophobes de cet ancien patron de la police et conseiller spécial de Sarkozy. Reste que la France va devoir convaincre ses partenaires européens, notamment l'Italie, que Schengen est mort. Un sommet franco-italien est prévu à Rome mardi, où Sarkozy expliquera, dit-on à l'Elysée, à Silvio Berlusconi pourquoi les harragas en provenance de Tunisie représentent bien une “menace grave” pour l'Europe. Le paradoxe est que ce même Sarkozy se démène pour chasser le tyran de Tripoli et contribuer à la reconstruction démocratique au sud de la Méditerranée. Guéant a bien voulu nous expliquer que c'est une “croisade”.