L'Algérie ne peut, dès lors, s'accommoder plus longtemps d'un immobilisme de la première institution du pays. Surtout en cette période où l'histoire, dans les pays de la région, s'écrit au présent. Maître Ali Yahia Abdenour a jeté hier un gros pavé dans la mare du jeu politique, ô combien agité, en ce moment, par une double effervescence aux plans national et régional. Il ne revendique rien moins que la mise en branle de l'article 88 de la constitution portant sur l'incapacité du président de la république à assumer la plénitude de ses pouvoirs. Il est même allé plus loin en interpellant l'armée, en sa qualité d'arbitre suprême, de “prendre ses responsabilités”. Mais en attendant le feed-back qui sera réservé à cette interpellation par qui de droit, la requête du vieux militant des droits de l'Homme, et pour hardie qu'elle puisse apparaître au premier chef, ne se fonde pas moins sur un fait absolument objectif : la récente prestation du président Bouteflika à la télévision, à l'occasion de son adresse à la nation, que l'avocat qualifie à juste titre de “pathétique”. Ce jour-là, effectivement, et tous les Algériens l'auront noté, le président Bouteflika était apparu très affaibli, avec des gestes lents et une voix cassée. Et c'est moins le contenu de son discours, pourtant très attendu, que sa forme physique qui aura polarisé l'intérêt des observateurs. Ce qui a eu, d'ailleurs, pour effet immédiat de relancer les rumeurs sur son état de santé et sa capacité à demeurer encore aux commandes du pays. Quelle est la part de vérité et quelle est la part d'affabulation de ces rumeurs ? Il appartient aux spécialistes de le dire en toute intégrité à travers un bulletin de santé du chef de l'état. Ce n'est pas un tabou, mais un usage consacré dans les “démocraties majeures”. Mais dans tous les cas de figure, le devoir de vérité de la part des responsables et le droit de savoir des citoyens doivent prévaloir sur les calculs étriqués. Car il ne s'agit pas de n'importe qui, mais bien du poste de président de la République. Surtout que dans le cas du président Bouteflika, partisan d'un régime présidentiel fort, il concentre aujourd'hui la quasi-totalité des pouvoirs entre ses mains. L'Algérie ne peut, dès lors, s'accommoder plus longtemps d'un immobilisme de la première institution du pays. Surtout en cette période où l'histoire, dans les pays de la région, s'écrit au présent.