Louisa Ferhat, Franco-Algérienne, âgée de 59 ans, est maire-adjointe du 15e arrondissement de la ville de Paris sous la bannière de l'UMP (Union pour la majorité présidentielle). En 2007, elle a voté Sarkozy et deux ans après Bouteflika. Son profil atypique ne s'arrête pas là. Ainsi, la politique est une histoire de famille. Le maire de la commune natale de ses parents, en l'occurrence Yakourène (Tizi Ouzou) n'est autre que son cousin. Aussi, elle ne renie pas son amazighité puisqu'elle préside depuis plus de sept ans l'Association des femmes berbères. Mieux encore, la maire-adjointe parisienne se voit bien aller du 15e à Zighout-Youcef. Devenir une députée… algérienne lors des prochaines élections législatives est loin d'être un vœu pieux pour elle. Côté DZ De passage à Alger, nous l'avons rencontrée le 20 avril dernier. Un hasard ? “Je vous assure que je n'y ai pas pensé du tout puisque je suis venue en Algérie spécialement pour construire la tombe de ma mère qui est morte il y a quelques mois”. Cependant, le sujet du Printemps berbère ne la laisse pas indifférente. “Vous ne me trouverez jamais dans un gala et jamais je ne danserai pour faire la fête sur les tombes des étudiants qui sont morts pour leur liberté, pour moi c'est inconcevable”. élue française, Louisa Ferhat compte bien avoir le même statut de l'autre côté de la Méditerranée. “Pourquoi pas ? Il faudrait être sur le terrain et moi je sais le faire”, avant d'avouer : “Je ne savais même pas qu'il y avait des représentants pour les binationaux et je ne l'ai su qu'en 2007”. Son ambition est motivée surtout par sa déception des profils des candidats aux dernières élections législatives algériennes. “Je les ai vus et ils ne parlaient, dans leur programme, que des problèmes qui surviennent pendant les périodes de vacances ou encore comment acquérir des bourses d'études pour leurs enfants en France”. Louisa Ferhat, “grande gueule” (comme elle aime se définir), raconte qu'elle avait interpellé l'un des “postulants” sur l'absence de la gent féminine sur sa liste : “Il m'a répondu qu'il n'avait pas besoin de femmes alibi, alors j'ai voté pour le candidat du FLN qui était plus convaincant, et surtout il n'avait pas de problèmes de discrimination”. Reste maintenant 2012. Une année très importante pour elle. Pas uniquement parce que le “big boss” de son parti, Nicolas Sarkozy, pourrait se faire réélire, mais également dans la perspective d'une place à l'APN. “Je peux être candidate pour représenter les gens de l'émigration puisque je connais leurs problèmes et moi, je ne vais pas parler seulement des vacances d'été mais je traiterai les problèmes concrets”. Pour la maire-adjointe du 15e arrondissement, tout dépendra des moyens. “S'il y a des personnes qui se proposeront pour financer ma campagne alors je n'hésiterai pas un seul instant”. Elle abordera aussi des problèmes “concrets” qu'elle a constatés sur le terrain, en Algérie. “Je connais ceux de Yakourène et je peux vous citer, par exemple, l'urgence de la construction d'une polyclinique ou encore les besoins de la population de mon village en assainissement des eaux”. L'ambition de glaner un siège à l'APN est loin d'être superflue pour cette fille de parents moudjahidine comme elle ne cesse de le dire avec fierté. “Mon père, qui est mort en 1971, a quitté l'Algérie en 1948 et il était membre de la Fédération de France, alors que ma mère était chef d'un réseau”. Un “statut” qu'elle veut étaler avec détail à l'appui “on ne parle que du 17 Octobre 1961, et de la répression qui s'était abattue sur les manifestants algériens à Paris, mais il faudrait aussi parler de la date du 20 Octobre, qui est celle des femmes et dans laquelle j'ai été moi-même arrêtée alors que je n'avais que 9 ans”. Côté FR Franco-algérienne, et élue UMP, cela ne semble pas déranger Louisa Ferhat. Sa position concernant les houleux débats actuels dans l'Hexagone autour de l'immigration, elle la veut “tranchante et franche”. Être membre d'un parti de droite qui prône, depuis plusieurs semaines, le même discours que l'extrême droite ne la dérange nullement. “Je fonctionne avec certains hommes, comme François Fillon (Premier ministre français, ndlr) qui me permet de rester dans le groupe UMP sans être gênée”. Par contre, la maire-adjointe n'apprécie guère le secrétaire général de son parti, Jean-François Coppé. “Il m'a sollicitée, à l'instar des autres élus UMP, pour participer à la convention sur la laïcité (organisée par l'UMP le 5 avril dernier, ndlr), je lui ai répondu : Je suis une Française de père et de mère, depuis 5 générations, et je suis d'origine africaine, musulmane, et je vous demande de m'oublier”. L'élue du 15e justifie sa vive réaction par le choix du thème de la rencontre. “Si le débat était autour de la laïcité et les religions, je serai peut-être allée mais avec ‘laïcité et islam' on est en train de stigmatiser ma communauté et c'est inconcevable pour moi”. Et de lâcher avec dépit : “Ils veulent récupérer les voix de Marine Le Pen, et ils se trompent.” Son engagement politique à l'UMP est justifié également par son “aversion” envers le PS, le grand parti de gauche. “Les socialistes nous (les Maghrébins, ndlr) veulent bien, mais en bas et c'est pourquoi je ne peux pas être dans un parti pareil”. Si incongru que ça ! Voir cette élue franco-algérienne l'année prochaine sur la liste des membres de l'APN serait-il si “incongru” que cela ? L'Algérie n'a-t-elle pas eu, depuis 1962, et jusqu'à aujourd'hui, de nombreux responsables politiques binationaux ! Ne faut-il pas (re)lancer le débat ?