Interpellée par la France et l'Italie pour trouver une solution à l'immigration illégale en provenance d'Afrique du Nord, l'UE réunira demain ses ministères de l'Intérieur pour se prononcer sur les mesures envisagées, dont notamment le rétablissement du contrôle aux frontières et les restrictions de visas. L'Union européenne s'apprête à prendre des mesures pour lutter efficacement contre l'immigration clandestine, devenue sa principale hantise depuis l'année 2011, avec les changements intervenus dans certains pays d'Afrique du Nord, lesquels ont provoqué une augmentation sensible du flux migratoire en direction du Vieux Continent. Répondant rapidement aux sollicitations de Paris et de Rome, qui ont réclamé il y a quelques jours que Bruxelles vienne à leur secours pour stopper la vague d'immigrants, particulièrement tunisiens, les ministres de l'Intérieur de l'Union européenne se réuniront demain pour se prononcer sur un ensemble de mesures destinées à “empêcher le franchissement irrégulier des frontières extérieures” et à “consolider une tradition d'asile et de protection”. Estimant que la lutte menée contre l'immigration clandestine a révélé des “défaillances” dans le contrôle de certains tronçons de frontières extérieures de l'UE, notamment entre la Grèce et la Turquie, l'UE s'apprête à recourir à ce qu'elle appelle “une protection des protections”, qui n'est en fait qu'une réinstauration du contrôle aux frontières. En effet, la Commission européenne suggérera demain “d'instaurer un mécanisme permettant de décider, au niveau européen, quels Etats réintroduiraient exceptionnellement des contrôles aux frontières nationales et pendant combien de temps”. Celui-ci serait “utilisé en dernier recours, dans des situations réellement critiques, jusqu'à l'adoption d'autres mesures visant à stabiliser la situation sur le tronçon concerné”. Il est même question “d'envisager la faisabilité de créer un système européen de gardes frontières” et de “renforcer la capacité opérationnelles de Frontex” (Agence chargée des frontières extérieures de l'UE, ndlr). L'autre décision, tout aussi importante, qui sera prise, est la restriction des visas, car la Commission européenne a constaté des “abus” dans les pays bénéficiaires d'une exemption de visa pour leurs ressortissants, notamment dans les pays des Balkans occidentaux comme la Serbie, la Macédoine, la Bosnie-Herzégovine, le Monténégro et l'Albanie. À partir de ce constat, il sera proposé une “modification du règlement prévoyant une clause de sauvegarde qui permettrait sous certaines conditions la réinstauration temporaire de l'obligation de visas pour les citoyens d'un pays tiers, pour lutter contre les abus”. Il est également question d'accorder une plus grande importance à la lutte “contre le marché du travail informel” dans les Etats de l'UE. L'objectif recherché de ces mesures sécuritaires est une politique plus incitative vis-à-vis des pays partenaires dont les ressortissants migrent illégalement dans l'UE. Ainsi, la commission européenne insiste sur la nécessité de “renforcer la politique de réadmission” des migrants en situation irrégulière par les pays d'origine, parce qu'il apparaît clairement que “les négociations sont difficiles avec plusieurs pays dont les plus importants pays d'origine et de transit de la migration irrégulière” en raison de “l'absence d'incitatifs donnés par l'UE tels que des mesures en matière de visas ou d'assistance financière”. Dans cette optique, il devient nécessaire d'“envisager les accords de réadmission dans la perspective des relations globales de l'UE avec le pays partenaire concerné”, estime-t-on à Bruxelles. Par ailleurs, la collaboration avec ces pays “devrait aussi se fonder sur une conditionnalité appliquée aux questions de migration”, ajoute-t-on. Quant aux demandes d'asile, Bruxelles préconise “d'aboutir à un accord équilibré sur la révision du règlement de Dublin” qui impose aux pays de l'UE où est arrivé le demandeur à les traiter. Elle recommande, en outre, de faire de “la réinstallation (des réfugiés dans les pays de l'UE) un geste fort de partage des responsabilités à l'égard des pays de premier asile, le plus souvent des pays en développement”.