“Ce n'est pas une honte de soutenir le droit à l'autodétermination d'un peuple.” Dans un discours télévisé prononcé le mercredi 6 novembre, le roi Mohamed VI a réduit à néant tous les efforts déployés, depuis de longues années, par les Nations unies et les différentes parties concernées par le conflit du Sahara occidental. En rejetant l'idée d'un référendum d'autodétermination, qu'il a qualifié d'“obsolète” et d'“inapplicable”, le souverain renie tous les engagements pris par le palais, y compris par son défunt père, le roi Hassan II, vis-à-vis de la communauté internationale. Mohamed VI met, alors, en avant la nécessité de rechercher une solution politique, une solution négociée, qui piétinerait sur l'esprit du plan de paix de l'ONU, dans le but de remettre en cause le caractère colonial du dossier sahraoui et d'imposer le fait accompli : l'occupation d'un territoire non autonome. Le jeune roi, en empruntant cette attitude intransigeante, s'oppose en fait aux décisions onusiennes, et, en particulier, à la dernière résolution du Conseil de sécurité. Cette dernière, adoptée en juillet dernier, a formulé clairement la nécessité de l'organisation d'un référendum au Sahara occidental, sans s'encombrer du tout de la fameuse “troisième voie”, préconisant l'autonomie des Sahraouis dans le cadre de la souveraineté marocaine, un projet proposé par l'Américain James Baker, en sa qualité de représentant personnel du secrétaire général de l'ONU. “Ce n'est pas une honte de soutenir la justice, de soutenir le droit à l'autodétermination d'un peuple”, tel est le message laissé par Fadel Ismaïl, militant du Front Polisario, décédé le 5 mai dernier. Dans sa “lettre à mon frère marocain”, un document inachevé qui a été publié au cours du mois courant par une association suisse (Arso), l'ancien diplomate sahraoui voulait ouvrir la discussion, en homme de dialogue. Il voulait débattre avec son voisin du Nord sur le conflit de l'ex-Sahara espagnol, qui dure depuis plus d'un siècle et qui a été rendu complexe, à partir de 1975, suite à l'agression et à l'annexion marocaine du territoire. Fadel Ismaïl était convaincu que l'indépendance du Sahara occidental serait à l'avantage des Marocains et d'un Grand Maghreb, qui reste à construire. Dans sa “lettre à mon frère marocain”, l'auteur insistait beaucoup sur la “reconnaissance de la différence”, la “reconnaissance de l'Autre”, en expliquant : “Les Sahraouis ne se sentent pas Marocains (…). Leurs coutumes, leurs traditions, leur langue et leur mode de vie disent suffisamment leur différence”. Puis, d'interpeller l'intelligence et l'esprit de responsabilité du citoyen marocain : “Il me semble que le moment est venu pour les démocrates marocains, de se positionner clairement par rapport au système (le Makhzen, NDLR), qui nous impose le mépris comme destin”. Fadel Ismaïl s'est éteint, en laissant son testament et en situant la responsabilité du Makhzen, mais aussi de la France, qui “n'a pas fini de coloniser le Maroc, en donnant la priorité à la défense de ses propres intérêts”. Une réaction peut-être brusque, mais qui reste une manière pour lui d'inviter l'administration française à se défaire de ses réflexes “néo-colonialistes” et à jouer un rôle dans la recherche de la paix et du partenariat. Fadel Ismaïl est parti, en appelant à “la réconciliation” entre Sahraouis et Marocains, sur des bases saines, de respect de chacune des parties. H. A.