En “décrétant” que la démarche des consultations politiques menée au pas de charge par le président du Sénat, Abdelkader Bensalah, demeure ouverte à “toute partie pouvant apporter sa contribution”, le président de la République ne fait pas que se conformer aux convenances politiques. Il admet implicitement que l'absence de l'opposition et de certaines personnalités aux consultations sur les réformes pilotées par l'instance de Bensalah a égratigné le crédit d'une démarche qui se veut d'abord consensuelle. “La large consultation que nous avons récemment décidée a permis de connaître l'avis de la classe politique, des personnalités nationales et de la société civile. Cette démarche demeure ouverte à toute partie qui voudrait encore y apporter sa contribution”, a relevé le chef de l'Etat, lors de la réunion du Conseil des ministres. Cette invitation semble répondre à un souci des hautes autorités du pays de chasser les soupçons qui pèsent sur la démarche. Depuis le discours de Bouteflika le 15 avril, des voix n'ont pas manqué, en effet, de s'élever pour critiquer le choix des personnes présidant aux consultations, mais aussi la démarche. Confiées à un personnel blanchi sous le harnais du régime, les consultations ont vu défiler une ribambelle d'acteurs politiques et de la “société civile” que d'aucuns ont qualifié de “cadavres”, de “fossiles” ou encore de “parasites”. À l'appel de certains à l'organisation d'une conférence nationale où chacun exprimera et défendra ses idées, le pouvoir a choisi une démarche unilatérale consistant à recueillir l'avis des convives, à telle enseigne que l'instance a été assimilée à “une boîte aux lettres”. À cela, il faut ajouter les pressions occidentales. On se souvient, en janvier dernier, autant Paris que Washington n'avaient pas manqué d'inviter les autorités algériennes à donner plus d'espace à l'opposition. Instruit des enjeux, Bouteflika entend donc s'entourer d'un maximum de chances de succès en relançant l'invitation à l'opposition. Histoire de rassurer, il promet même que “toutes les propositions seront prises en compte”. “Les contributions et vues recueillies seront prises en considération dans l'élaboration de tous les projets de texte, y compris celui relatif à la révision de la Constitution, en ayant à l'esprit les principes, les constantes et les intérêts de la nation”, a-t-il assuré. Et il s'engage même à consolider l'Etat de droit à travers “une séparation bien comprise des pouvoirs, une garantie confortée des droits et des libertés individuelles et collectives, le renforcement du pluralisme démocratique et un dispositif électoral offrant des garanties plus fortes de transparence et d'impartialité”. Reste maintenant à savoir si l'opposition va saisir cette nouvelle perche tendue. S'il faut se garder de toute conclusion hâtive, il apparaît clair qu'il lui sera difficile de se déjuger au risque de perdre son crédit. Car les divergences sont très profondes. Et la plus fondamentale : comment parler de réformes à un interlocuteur qu'on accuse d'être à l'origine de la faillite générale et dont on exige le départ…