Résumé : Mohand touche à peine à son repas. Amar, lui, est préoccupé. Il n'avait pas revu sa famille depuis deux années. Il se lève pour s'accorder quelques heures de repos et exhorte son frère à en faire de même. Mohand ressorti de la remise, puis y revint pour prendre des cigarettes et se retrouve nez à nez avec Ghenima ! La jeune fille essuya se lèvres avec son bras d'un geste prompte. Elle venait de manger le reste du couscous et s'apprêtait à quitter les lieux. Elle pousse un petit cri à la vue de Mohand et tente de se sauver, mais ce dernier la retint par le bras. À la lueur de la torche qui éclairait la remise, il vit que la jeune fille avait les traits tirés, et que ses vêtements étaient en lambeaux. Elle grelottait de froid et semblait affamée.. - Ghenima ! Elle tente de se dégager, mais la poignée ferme de Mohand l'en empêcha. - Où vas-tu ? Elle garde le silence l'air coupable et malheureux. Mohand la secoue : - Où étais-tu passée ? Où veux-tu partir par ce temps ? Ghenima tremblait et Mohand lui tendit sa couverture. Elle s'en empare et la met sur ses épaules. Mohand se sentant tout d'un coup las, se laisse tomber sur sa couche. La fièvre était remontée et une migraine le taraudait. Ghenima n'ayant plus le choix, vint s'asseoir auprès de lui. Elle semblait plus calme et Mohand l'attire dans ses bras en lui caressant les cheveux. - N'aie pas peur ma chérie… Rien ne t'arrivera de fâcheux tant que je suis de ce monde. Mais pourquoi t'es-tu enfuie comme une voleuse. Je me faisais un sang d'encre pour toi. Ghenima étouffe un sanglot. Elle avait eu si peur, si froid dans la forêt. Elle avait affronté mille et un dangers tout au long de la journée, avant de se décider à revenir au village. Le courage lui avait manqué lorsqu'elle s'est retrouvée face à des animaux sauvages. Elle n'avait dû son salut qu'à sa promptitude et à sa sveltesse. Elle était montée au sommet d'un olivier, alors qu'un loup menaçait de la déchiqueter avec ses crocs. La bête avait tournoyé inlassablement autour de l'arbre, avant de se décider à battre en retraite et à aller chercher son dîner ailleurs. La nuit était tombée et Ghenima, qui avait passé une rude journée, avait décidé de revenir au village. Seulement l'affaire n'était pas facile. Elle avait fugué et ne pouvait penser à rentrer chez elle. Il n'en était d'ailleurs plus question. En remontant la colline, elle avait vu des femmes en redescendre. Quelqu'un était donc mort. Elle s'était cachée dans la pénombre des roseaux bordant la route et n'avait eu aucun mal à deviner que c'était Na Aldjia qui venait de mourir. Son cœur s'était serré. Mohand était déjà mal au point lorsqu'elle avait quitté la grange le matin même et, maintenant, on avait dû le ramener à la maison. Elle avait alors décidé de se rendre à la maison mortuaire et de se faufiler parmi les femmes en se voilant la tête. Personne n'avait fait attention à son passage. Elle avait alors contourné la maison et était demeurée prostrée sur elle-même à l'abri des regards. Elle avait entendu Mohand parler à quelqu'un, puis l'avait vu rentrer dans la remise avec lui. Quelques instants plus tard, l'homme était ressorti de la remise, puis elle avait vu Mohand quitter son gîte pour aller s'asseoir un moment dehors. Une odeur de couscous s'était répandue dans l'air et elle n'avait pu résister à l'envie d'en manger en guettant le moindre bruit. Elle s'était glissée dans la remise tel un fantôme et pensait en ressortir sans trop de mal, après avoir mis faim aux gargouillements désagréables de son estomac affamé. Mais au moment où elle s'était relevée pour quitter les lieux, Mohand l‘avait surprise. Ça aurait pu être quelqu'un d'autre, mais apparemment la providence était avec elle. (A suivre) Y. H.