Une musique envoûtante, des airs entraînants et un jeu de scène impressionnant. Ce sont-là les ingrédients servis par l'ONB, pour un concert unique et exclusif à Alger. La digestion sera longue et lente. Quelle agréable soirée que celle d'avant-hier, à Khaïmatkoum Djezzy, au niveau de l'hôtel Hilton. Face à un public nombreux et conquis d'avance, l'Orchestre national de Barbès (ONB) a offert un spectacle d'une grande beauté. Un savoureux mélange de sonorités d'ici et d'ailleurs. Des sonorités algériennes mêlées avec ingéniosité à celles du monde qui entoure ces brillants musiciens (reggae, rock, blues, gnaoui, alaoui…). Tout le monde s'y retrouve ! D'où la classification de ce groupe dans le registre World-music. Ce qui rappelle les premières années de l'apparition de la musique jazz, et le raccourci que prenaient certains (beaucoup !) pour considérer comme appartenant au jazz, toute musique qu'ils n'arrivaient pas à catégoriser, à classifier, à maîtriser, ou à comprendre. C'est peut-être une musique du monde que celle que propose l'Orchestre national de Barbès, mais ce sont surtout des rythmes qui nous parlent, qui nous traversent, et nous invitent à bouger, à danser, à se déchaîner…sur la piste de danse évidemment. Et pour revenir sur ce concert, on prendra volontiers le risque de la redondance et de la répétition, en rappelant que les plus beaux titres du répertoire de l'ONB ont été revisités avec adresse, habileté et grande souplesse. Une sélection de leurs trois albums. Une pluie de sonorités, compilés et assemblés avec art et savoir-faire. C'est aux environs de vingt-heures que le groupe est monté sur scène, avec le joueur de batterie qui a donné le ton, puis tous les musiciens l'ont rejoint muni de qraqeb (des crotales). En ouverture, l'incontournable chorfa. Un morceau profond et aérien qui chante la gloire des chorfa (les saints et hommes de Dieu), durant les membres de l'ONB, vêtu de manière traditionnelle, se sont positionnés en ligne horizontale, jouant au karkabou. Puis, chacun se positionne, prend son instrument, et comme toujours, Youcef Boukella -un intriguant personnage- se met quelque peu à l'écart, et semble se cacher derrière sa basse. Par la suite, le rythme s'accélère, les instruments se multiplient (goumbri, guitare électrique, accordéon), créant ainsi une multitude de sons et de rythmes, qui feront danser la quasi-totalité des spectateurs, et même les plus récalcitrants d'entres-eux cèderont totalement à l'envoûtante musique de ce groupe, qui est passé en exclusivité à Khaïmatkoum chez Djezzy. D'ailleurs ce concert est la seule et unique date algéroise de l'Orchestre national de Barbès, durant ce mois de carême. Ils enchaîneront ensuite des titres comme Madame la France (reprise de Slimane Azem), Chkoun, Sidi Yahia, Civilisé, Alik ou encore Khalti Hlima. La surprise ou le clou de la soirée, c'est le duo que l'ONB a réalisé avec la formation Noudjoum Gourara. Un groupe qui a montré aisance et virtuosité sur scène, n'a pas du tout démérité aux côtés des maîtres de la scène. L'ambiance se transforme, et le son qui était au départ métissé, devient purement gnaoui. Muni de qraqeb, de tambour et d'un goumbri, ils offriront au public un mix du gnaoui algérien et marocain, en reprenant notamment le standard Baniya bania, tout en proposant des danses largement entraînantes. Pour le final, l'Orchestre national de Barbès a bien évidemment interprété le morceau, Alaoui. Bissés, les membres de l'ONB sont revenus pour une valse sur les airs de musette. Durant tout le concert, ils n'ont cessé de scander à l'adresse du public : “Habillez-vous d'un sourire jusqu'à demain”. Si on ne peut jurer que tous les présents ont gardé le sourire jusqu'à hier, on peut quand même attester qu'ils ont souri jusqu'au s'hour.