Plus gros créancier des Etats-Unis, Pékin fait aujourd'hui la leçon aux Occidentaux, exigeant d'eux qu'ils mettent de l'ordre dans leurs finances. Il est loin le temps où la Chine était sous la pression des critiques occidentales à cause de son non-respect des droits de l'homme. Aujourd'hui, c'est avec un malin plaisir que Pékin les admoneste, leur distribuant des conseils économiques. Commentant la tourmente des marchés, la presse chinoise s'en donne à cœur joie. Le Quotidien du peuple, organe du Parti communiste, appelle ainsi les pays occidentaux à “prendre leur courage à deux mains” pour diminuer leur endettement. “Si les pays développés refusent d'assumer leur responsabilité, cela va avoir de graves conséquences sur la stabilité et le développement de l'économie mondiale”, assurait un de ses éditoriaux. L'agence “Chine nouvelle” appelait, de son côté, la classe politique américaine à cesser de se déchirer de façon stérile après l'abaissement de la note de la dette des Etats-Unis. Samedi 6 août, l'agence avait déjà stigmatisé “l'Oncle Sam, perclus de dettes” et dénoncé les pays qui vivent à crédit. “Afin de soigner leur dépendance aux dettes, les Etats-Unis doivent rétablir le principe du bon sens selon lequel il faut vivre selon ses moyens”, écrivait l'agence chinoise. Elle appelait Washington à faire des coupes dans ses “dépenses militaires gigantesques” et dans ses “coûts surgonflés d'aide sociale”. “La Chine a désormais tous les droits d'exiger des Etats-Unis qu'ils s'attaquent à leur problème structurel de dette”, exulte Pékin. Il faut raison garder, relativiser ce procès. La Chine détient actuellement pour 1 160 milliards de dollars bons du Trésor américain. Cela fait d'elle, et de loin, le premier créancier des Etats-Unis, mais ce n'est qu'à peine tout au plus 10% de la dette américaine, une goutte d'eau. Et puis, l'intérêt chinois n'est-il pas dans les exportations où les Etats-Unis tiennent la tête. Donc, bien au contraire, si l'Amérique venait à sombrer, la Chine sera la seconde à en pâtir. Pékin et Washington, c'est l'histoire des vases communiquants. Dans un passé récent, Pékin a déjà utilisé cette position pour faire valoir ses intérêts, notamment lorsque Obama avait estimé, l'an dernier, que le cours de la monnaie chinoise était sous-évalué. Pékin avait alors laissé entendre qu'il pourrait diminuer ses achats de bons du Trésor américain. Mais les Chinois en sont restés à leur menace. Alors, quel sort pour l'avertissement du 3 août de la Banque centrale chinoise qui avait à nouveau indiqué son intention de diversifier dans l'avenir ses achats de devises étrangères de façon à diminuer les risques auxquels elle est exposée ? Pour l'instant, Pékin, qui n'a pas rejoint le G8, se contente de faire sentir aux grands pays occidentaux qu'elle les considère comme plus fragiles qu'ils ne voudraient le paraître.