En matière d'hospitalisation, le secteur privé représente 8% des capacités totales dans la wilaya de Constantine. Avec un secteur public dépassé par le nombre de patients qui ne cesse d'augmenter, un manque de matériel flagrant et une mauvaise gestion chronique, les malades se voient obligés de s'adresser aux cliniques privées, pour des services qu'ils sont en droit de recevoir dans un hôpital. Et c'est le citoyen au revenu modeste qui ne peut pas accéder à un hôpital du secteur public, car il n'est pas “oulid flen”… ou ne connaît pas “flen”. “La force d'un pays qui veut préserver sa santé réside toujours dans le secteur public, le privé, lui, reste un secteur d'appui”, nous dira le docteur Ben Bouhedja, directeur de la clinique Ibn-Rochd à Constantine. C'est loin d'être le cas, malheureusement. En effet, le centre hospitalo-universitaire Ibn-Badis de Constantine, l'un des plus importants de l'Est et qui gaspille des milliards, en faux frais, chaque année, donne, à l'instar d'autres infrastructures hospitalières du pays, une image négative de la santé. “J'ai été hospitalisée pendant 15 jours au CHU et c'est moi qui achetais mes médicaments et même le coton”, raconte une patiente rencontrée dans la salle d'attente d'une des cliniques privées. Tout en ajoutant que même pour l'hospitalisation, il fallait l'intervention de sa cousine, médecin. Notre interlocutrice reconnaîtra, alors, préférer venir dans une clinique privée, même si cela lui coûte cher. En effet, en matière d'hospitalisation, le secteur privé représente 8% des capacités totales dans la wilaya de Constantine, laquelle compte 13 cliniques privées, qui emploient 1 129 praticiens et paramédicaux. Sans parler de celle fermée, tout récemment, à savoir la clinique d'ophtalmologie El-Anouar, pour non-respect du cahier des charges. Cette dernière, pour rappel, avait fait l'objet d'une instruction judiciaire après que trois de ses patients eurent déposé une plainte, pour négligence ayant conduit dans l'un des cas à la mort d'un nouveau-né. “Face à une affluence de plus en plus significative et à un déficit structurel spécialisé au niveau des hôpitaux publics dans l'est du pays, les cliniques et maternités privées sont devenues la destination obligée des patients”, explique un médecin gynécologue qui exerce dans une clinique privée. Et d'ajouter : “Un simple accouchement, avec une nuitée dans une clinique privée, est facturé entre 20 000 et 30 000 DA, alors que le coût d'une césarienne peut aller jusqu'à 50 000 DA.” Notons que le CHU de Constantine a recensé, rien que pour l'année 2010, 16 000 accouchements dont 4 000 par césarienne, soit un taux d'occupation de lits de 3%. “Vu l'état peu reluisant de la maternité du CHU, j'ai eu peur et j'ai préféré accoucher dans une clinique privée, malgré la cherté des services octroyés par celle-ci”, nous a déclaré une patiente. Plaintive, notre interlocutrice continue : “Nous avons été obligés, mon mari et moi, d'emprunter de l'argent, afin d'éviter d'éventuelles complications lors de mon accouchement.” Et d'argumenter : “Il faut dire que l'hygiène est loin d'être le souci numéro 1 dans le secteur public.” L'autre point noir dans ce tableau est la Sécurité sociale. En effet, les bénéficiaires de la Sécurité sociale sont remboursés à un taux qui ne dépasse pas 1%, et ce, dans le meilleur des cas, selon le docteur Ben Bouhedja. Par ailleurs, il n'est un secret pour personne que certains médecins du secteur public font cavaler les patients jusqu'à épuisement, pour que ces derniers, perdent tout espoir et s'adressent à des cliniques privées et se font opérer par ces mêmes médecins indélicats. “Mon médecin traitant m'a affirmé que je pouvais accoucher normalement, mais j'ai accouché par césarienne dans une clinique privée. Tout cela pour gagner plus d'argent”, nous a déclaré une patiente venue pour un contrôle. Le cas des cliniques spécialisées en maternité reste un exemple parmi tant d'autres. Mais elles restent les cliniques les plus fréquentées, suivies de celles de la chirurgie générale et l'ophtalmologie.