Louisa Hanoune s'en offusque, mais c'était sa revendication récurrente : l'ingérence de l'administration dans les affaires du parti. Il n'y a pas d'autre moyen, en effet, d'empêcher le nomadisme politique qu'elle dénonce, depuis que des députés lui ont faussé compagnie avec voix et indemnités, que celui de prévoir des sanctions administratives contre les élus félons. Et si l'administration peut sévir ici, pourquoi ne pourrait-elle pas le faire là ? La secrétaire générale du PT demande à la loi de faire en sorte que le gouvernement lui assure la fidélité de ses élus. Mais, pourtant, quoi de plus antidémocratique que d'obliger, administrativement, un élu à la discipline organique ? L'élu est réputé contribuer au travail de son assemblée et voter en fonction d'engagements électoraux, de convictions personnelles et de… directives de parti. La manifestation d'infidélités organiques, idéologiques ou programmatiques sous forme de dissidence d'élu est souvent l'expression d'un échec politique du parti concerné. Il n'aura pas su, par son effort de formation, son mode de fonctionnement et sa pratique militante, produire une élite de conviction et de loyauté. Pourquoi l'administration devrait-elle alors venir corriger les faiblesses des partis acteurs de la vie politique ? Pour d'autres raisons que celle du “mandat populaire” — à 26 % — invoqué par Belkhadem, il n'est pas possible d'obliger un élu à se “sédentariser”. Cela reviendrait à lui ôter la liberté de voter et de donner au parti le droit de disposer “en gros” du nombre de voix et de cotisations équivalents à son groupe. Cette préoccupation pour la sédentarité politique vient directement de la pratique nationale du multipartisme, une pratique entièrement pervertie par la culture du quota et par l'importance prise par les sièges à fortes indemnités dans la vie des partis politiques. En plus de se battre pour la consistance du “quota” et des indemnités individuelles, on se mobilise aujourd'hui pour assurer la continuité de cette quote-part pour la durée du mandat. Le PT est le parfait exemple du parti qui s'accommoderait bien de ce système vicieux et, bien entendu, antidémocratique. Jusque dans son argumentation, Louisa Hanoune explique que sa remise en cause ne concerne pas le système, rappelant invariablement qu'elle dénonce les travers des lois parce qu'ils “sont en contradiction avec les orientations du président de la République”, Président qui, en effet, symbolise le système. En d'autres termes, “les orientations” du Président sont pertinentes pour peu qu'il intervienne pour imposer les arrangements qui conviennent au leader du PT. Tout en appelant à mettre le mandat législatif à l'abri de l'influence de l'argent, elle laisse transpirer sa préoccupation de l'intégrité de son quota et le traumatisme de la mutinerie qu'on dit “financière” de certains députés. Pas besoin d'approcher “les hommes d'affaires” pour succomber à la vénalité. C'est une maladie gagne-petit mais qui, comme le dit Louisa Hanoune, “peut constituer un danger pour la République”. Quand il y en a une. On disait bien qu'on ne pouvait pas faire une réforme démocratique avec ce régime. Ni avec son opposition. M. H. [email protected]