RéSUMé : Karim est apaisé en découvrant que Hadja Sadia se souvenait de sa défunte mère Houda. Devant la porte de sa maison, Karim est interdit d'entrer par un jeune insolent, qui se trouve être son demi-frère. Il pousse légèrement le gamin qui tombe en larmes. Son père console le petit impudent quand la marâtre l'inondait de réprimandes et d'invectives, certifiant que Karim désirait tuer son demi-frère afin d'hériter de la demeure… Hébété par cette paranoïa dont souffrait cette femme, il m'était difficile de rester debout, les jambes tremblantes, la voix qui perdait de son timbre, je ne comprenais pas pourquoi on me réprimandait, pourquoi on me noircissait les traits, on disait de ma personne des infamies. Et mon père, qui prenait soin de son nouveau fils, m'abandonne à mon sort, seul à affronter la “baleine”. Dépité, je n'ai d'autre choix que de prendre la porte, car je n'étais pas habitué à ce langage rustique, ces accusations légères et ces disputes si vite allumées qu'elles s'embrasent, incendiant ma confiance et ma sérénité. Je sors prendre l'air, je marche dans la rue, comme un chien errant, essayant de me rappeler les bribes de souvenirs heureux qui effaceront de ma mémoire ce cauchemar que je viens de vivre. Je suis depuis des heures dans ce parc à regarder des enfants jouer, pleurer, rire, mais confortés par la présence sereine de leurs parents, qui étaient juste à côté d'eux, afin de garder un œil sur eux. Le sentiment de me perdre me traverse l'esprit, je savais que si j'allais vivre avec cette détestable femme et son gamin, il fallait que je change de personnalité, que je ne me laisse pas écraser par les bonnes manières qui restent du domaine de l'inconnu pour ce genre de personnes. “Je dois changer !” C'est ce que je voulais faire, mais est-ce que j'y arriverai ? Vais-je garder mes traits passibles devant ses offenses, tout en désarçonnant ses pièges et manigances ? Vais-je respirer, même noyé par les reproches ? Je n'ai pas de réponse. J'ignore quel sera mon avenir. Je ne garde que Dieu dans mon cœur, le caractère de ma mère, le visage de mon frère et le sourire de Donya, c'étaient mes seuls baumes au cœur pour affronter cette belle-mère à scandales. Il se fait tard, je dois rentrer à la maison, le muezzin appelle à la prière d'el-maghreb. Je décide d'aller à la mosquée prier la tête reposée. J'entre dans ce lieu sacré plein de quiétude et de tranquillité. Soudain, le poids sur mes épaules s'amoindrit, mes pensées noires sont blanchies, une sensation de bien-être m'envahit… Je me sens si invincible ! Comme si les malheurs du monde ne sont rien comparés à ces moments de bonheur intense que j'ai vécus dans cette endroit, où je sollicitais le pardon de Dieu, sa protection et sa miséricorde. Je me sentais vivre pour un objectif, vivre pour quelqu'un, car Allah ne m'a pas créé pour souffrir puis mourir. Au fond de mon cœur, je récitais cette prière, espérant que les mœurs changent, que ceux que j'ai fait souffrir me pardonnent, que ma tête fredonne le nom d'Allah que je me permette d'espérer, encore une fois. Sans que je le remarque, la prière d'el-icha s'invite à mon horaire, je reste dans la mosquée, pourquoi partir si je me sentais apaisé ? Mais tôt ou tard, je dois affronter mes appréhensions et retourner dans cette maison, qui n'est plus mon chez-moi. Perdre ce sentiment d'assurance, de sécurité ou de sûreté se produit quand on n'a plus aucun endroit où se réfugier, ni personne à solliciter, si par malheur le destin intervient, pour tester ma patience et ma bravoure qui chancellent, car il n'y a que Dieu qui m'aime. Le ciel s'assombrit, comme pour mon cœur, sans aucune étoile pour éclairer ma nuit, ni même la lune pour me guider à travers les ténèbres. J'ai si peur, j'ai un peu froid, j'ai très faim et je somnole. Je vois la demeure de mon père, reconnais sa voiture, avec mes bagages à l'intérieur, personne n'a daigné les sortir, on n'attendait que moi pour m'occuper de moi. Je constate cela avec déception, car je pensais au plus profond de mon cœur que mon père m'attendrait impatiemment, en ayant préparé ma chambre. Nulle illusion à se faire, mon paternel est toujours le même, insensible. Qu'attendais-je de lui ? Je frappe à la porte, personne ne vient ouvrir, je sonne, j'insiste, mon père arrive enfin et en ouvrant me hurle dessus : - C'est à cette heure-ci que tu rentres ? Je me demande comment ta tante t'a éduqué, mais moi je ne tolère pas ces sorties nocturnes ! - Papa c'est toi qui m'as élevé ! J'essayais d'appeler son instinct paternel. En vain. - Moi j'ai élevé Redouane comme un grand gaillard, et tu te permets de le frapper. Pour qui tu te prends espèce de voyou ? Constatant que mon père était assez remonté contre moi, il m'est paru clair que cette belle-mère des malheurs a rempli sa tête de toutes sortes de sornettes. Je retiens mes larmes, et je lui affirme innocemment : - Mais papa, je t'ai expliqué que ce n'était pas du tout ma faute. - Tu te tais ! Quand je te parles tu écoutes et tu me respectes ! - Papa ! Pourquoi est-ce que tu m'as caché que tu t'es remarié ? Tu ne m'as jamais parlé de ce frère dont j'ignorais l'existence jusqu'à ce jour ! - Et toi, est-ce que tu as cherché à me revoir ? - Non… mais je pensais que tu viendrais me voir, j'attendais que tu fasses le pas ! - Pourquoi m'abaisserais-je à venir te rendre visite, toi qui n'a jamais cherché après moi. - Parce que tu es mon père, je pensais que ce lien en lui-même était une raison valable pour que j'espère te revoir. (À suivre) H. B.