M. Berradja ne restera plus seul dans la page bavarde des annales de la justice algérienne. L'actuel occupant de son ancien poste, procureur général à la cour d'Alger, vient d'inaugurer, quoiqu'à la hussarde, une nouvelle ère de communication. Tardive certes, mais elle a le mérite dans le contexte actuel de toucher à des dossiers aussi lourds que sensibles. L'intervention de M. Belkacem Zeghmati pourra ouvrir d'autres pistes dans le débat ambiant sur la justice et son rôle. Attendue dans le traitement des dossiers des scandales économiques, la justice aura fort à faire pour se maintenir — pour combien de temps ? — loin du sulfureux débat sur son indépendance et, surtout, loin du tourbillon soulevé par quelques révélations de magistrats sur les injonctions de la chancellerie. Alors que le président de la République s'est contenté d'une plaidoirie généraliste lors de l'ouverture de l'année judiciaire, sans référence aucune à la corruption ou autre tache dans l'édifice, le ministre a nié toute ingérence de son département dans le travail des magistrats tout en se dédouanant de telles pratiques. Il martèlera le leitmotiv de l'indépendance de la justice. Cette unanimité sera renforcée, mais avec une nuance, par le président du syndicat des magistrats, M. Aïdouni, qui surprendra avec son invitation à ses pairs de ne pas obéir aux ordres venus d'en haut. Loin d'être une sentence, le propos du magistrat suggère une parade aux pressions de la chancellerie qu'il reconnaît implicitement. Unanimité toute factice vue sous l'angle du malaise qui caractérise tout le corps judiciaire, y compris le dernier maillon, les avocats. Inscrite d'emblée dans une sorte d'opposition à la tutelle, la défense se radicalise dans une position de principe qui rejette en bloc le système Belaïz, quand bien même il pourrait leur être favorable. Le véritable débat sur l'indépendance de la justice ne semble pas encore avoir commencé. Il est encore entouré d'une culture et de pratiques ancrées qui font dans la résistance à tout texte ou volonté de changement. D. B.