Le bus est arrêté, les voyageurs sont angoissés : est-ce la panne ? Le chauffeur et le receveur, après un long conciliabule, finissent par remonter dans le bus. Les questions se mettent aussitôt à fuser : le bus est-il réparé ? Va-t-on enfin repartir ? Il se fait tard, et en ces mois d'hiver, le soleil ne va pas tarder à se coucher. Il y a même la jeune fille qui, d'une voix pleurnicharde, parle de son père qui l'attend… - Du calme, du calme…, dit le chauffeur. - Alors, nous allons repartir, oui ou non ? La question a été posée par un vieil homme emmitouflé dans son manteau. Il a parlé d'une voix si forte que tout le monde s'est retourné pour le regarder. Le chauffeur, cette fois, n'hésite pas à parler. - Mon disque d'embrayage est cassé… - Et alors ? Vous devez avoir une pièce de rechange… - Hélas, non, grand-père, on n'emporte pas des disques d'embrayage avec soi ! Les passagers s'énervent de nouveau : on n'allait tout de même pas passer la nuit ici, en rase campagne, il commence déjà à faire froid, il y a des femmes et des enfants, et cette jeune fille que son père attend… - Du calme, dit encore le chauffeur. - Des bus vont passer par là, ils nous prendront… - Nous sommes nombreux… Ils prendront tout le monde ? - Oui, ne vous inquiétez pas, nous nous serrerons mais ils nous prendront tous ! Le vieux qui a capté l'attention un moment lève. - Je descends me dégourdir les jambes… D'autres le suivent. Omar s'est approché de la jeune femme. - Vous arriverez en retard, mais l'essentiel n'est-il pas de partir ? Elle pousse un soupir. - C'est bien ma chance, c'est la première fois que je voyage seule… Elle regarde sa montre. - L'heure de l'arrivée du car approche… Mon père doit être à la gare… - Il aura compris que le car a du retard ! - Ah, si seulement on pouvait téléphoner ! - N'espérez pas trouver une cabine téléphonique dans ces parages ! Omar l'invite à descendre se dégourdir les jambes. - Vous avez raison ! Il l'accompagne. Elle regarde autour d'elle. - Comme c'est vide, dit-elle. Elle ramène le col de sa veste sur son cou. - Il fait froid… - Alors retournez dans le car… - Non, non, je préfère humer l'air… Je me sens comme angoissée dans ce bus… - Vous êtes étudiante ? dit Omar - Oui, je retourne dans ma famille pour les vacances… Mon père va penser que j'ai eu un accident… (à suivre) G. B.