Affaire “des bons de caisse” de Mohamed Benchicou Ouyahia savait Le Chef du gouvernement avait été averti par le directeur général des douanes de l'illégalité des poursuites contre le directeur du Matin. Une révélation de taille vient d'éclairer d'un jour nouveau la cabale montée contre le directeur de publication du journal Le Matin, Mohamed Benchicou, arrêté le 23 août par des éléments de la police des frontières en possession de bons de caisse d'une valeur de 11 700 000 DA. Le 25 août, la direction générale des douanes a envoyé un bulletin de renseignements, portant le numéro 1103, au Chef du gouvernement, Ahmed Ouyahia, et au chef du Département renseignement et sécurité (DRS), infirmant l'existence d'une quelconque infraction. Pour la direction de la douane, l'interception de Benchicou par les éléments de la police des frontières avant l'accomplissement des formalités légales auprès des services des douanes est “une violation des dispositions légales”. Elle ne permet pas “d'asseoir une quelconque infraction dans la mesure où l'intéressé peut faire valoir ses droits seulement auprès des services des douanes à tout moment pour les objets et effets personnels (y compris les capitaux)”. Aussi, pour l'institution de Sid-Ali Lebib, “les éléments de la PAF, même s'ils pouvaient avoir un renseignement ou avoir découvert des devises dans les bagages du passager, ne pouvaient à aucun moment le poursuivre, puisque l'infraction de changes ne peut être constatée qu'après accomplissement des formalités douanières”. Une position similaire à celle exprimée par le syndicat des douanes le 30 août. Ce dernier avait indiqué, dans une déclaration publique, qu'“en application de la loi, ne peut constituer une infraction ou un délit à la législation douanière que si la personne concernée s'est présentée à un bureau des douanes, s'est acquittée des formalités douanières requises…”. Se pose alors une question : pourquoi le Chef du gouvernement n'a pas pris en compte un avis aussi autorisé que celui de l'administration des douanes ? Comment le ministre des Finances, Abdelatif Benachenhou, a-t-il pu déposer, le 26 août, une plainte contre Mohamed Benchicou pour “infraction” à la réglementation “régissant le contrôle des changes et les mouvements des capitaux” alors qu'une journée auparavant, l'institution douanière, qui est pourtant sous son autorité, constate l'inexistence d'infraction ? Contacté, Mohamed Benchicou s'est félicité de la nouvelle, en s'exclamant : “Tant mieux pour la vérité qui éclate ainsi !” Pour lui, cette position de la direction de la douane conclut “à la nullité de la procédure judiciaire lancée à mon encontre, du fait qu'il n'y avait pas d'infraction”. Il ne trouve pas moins étonnant que, “sur la base d'une procédure nulle comme vient de l'attester le document, le ministre des Finances a quand même déposé une plainte contre moi, même après avoir reçu la lettre du directeur général des douanes. Malgré cela aussi, Ouyahia a laissé faire le parquet général pour exiger contre moi un mandat de dépôt ! C'est-à-dire s'il n'y avait pas la sagesse qui a prévalu à la dernière minute pour sauver ce qui reste de la crédibilité de la justice, j'aurais été emprisonné le 27 août 2003 sur la base d'une procédure nulle et non avenue”. “Politiquement, cela veut dire que le gouvernement s'est rendu coupable d'une grave entorse à la loi de la République parce qu'il a laissé faire Yazid Zerhouni qui a juré de prendre sa revanche sur le directeur du Matin après les révélations sur son passé de tortionnaire”, a-t-il conclu. Rappelons que Mohamed Benchicou est sous contrôle judiciaire depuis le 27 août. À plusieurs reprises, le procureur de la République a essayé vainement de placer le directeur du Matin sous mandat de dépôt. La demande des avocats de la défense de la levée de sa mise sous contrôle judiciaire sera examinée demain après un premier renvoi, le 9 novembre. Avec ce nouveau document, aura-t-elle gain de cause ? A. C.