Le président du RCD avertit contre la menace de régression politique par l'alliance de Bouteflika avec les islamistes. “Le chef de l'Etat se comporte comme un chef de bande. Il dérape dans des comportements qui mettent en danger la nation. Quand on en vient à utiliser le tribalisme pour asseoir son autorité, cela veut dire que la fonction de chef de l'Etat ne compte plus”. C'est la conviction du président du RCD qui a animé, dans la soirée de lundi, au siège du parti à Tizi Ouzou, une conférence-débat sur la situation politique nationale et ses perspectives. sadi considère comme étant un scandale le fait que des membres du gouvernement soient recrutés sur une base tribale. Il n'y a pas que cela, puisque, pour ce dernier, l'impasse politique se manifeste aussi dans la position du chef du gouvernement, pratiquement sans parti, qui prétend être dans une position anti-islamiste et affirme en même temps être au service du chef de l'Etat qui, lui, est au service de l'islamisme. La démarche est dangereuse car, constate le leader du RCD, “le président de la république veut nous ramener au débat des années 1990, comme si les Algériens n'avaient pas résisté” au terrorisme islamiste. Bouteflika assume son alliance avec les islamistes en prévision de la prochaine présidentielle. “On assiste à la tentative de la reconstitution de l'opposition à partir de l'étranger”, dira encore Saïd sadi, en citant l'exemple de l'autorisation de sortie de Abassi Madani en Malaisie et qui s'adonne à des déclarations politiques. Sur le plan économique, les partenaires étrangers, européens notamment, “refusent de faire la moindre projection politique en Algérie tant que Bouteflika est au sommet de l'Etat”, informe sadi. Le fait que le gouvernement affecte de l'argent public à des entreprises dont on ignore la santé financière, le fonctionnement et les capacités de survie, cela s'inscrit dans une démarche électoraliste et non économique. “On est parti pour une campagne électorale à 29 milliards de dollars”, ironise-t-il. Autre élément d'analyse de la situation politique : l'étouffement des libertés et la crise de Kabylie. Des journaux sont menacés dans leur survie, des espaces publics sont fermés aux partis politiques démocratiques, fermeture des médias publics à l'expression libre et plurielle… Le tout est couronné par l'abus d'autorité. Le conférencier cite l'affaire Benchicou, dans laquelle c'est le ministère de la Justice qui viole le premier la loi. “Nous sommes en train de subir un petit Staline de poche”, fera remarquer l'orateur pour qui le mouvement des libertés démocratiques est en train d'être mis à mal. Ce qui se passe en Kabylie depuis près de trois années est un exemple concret. “Il n'est pas quand même normal qu'il y ait 123 assassinats et que depuis trois ans, il n'y ait pas de sanctions à ce jour”, dénonce le Dr Sadi. “Il n'y a pas de volonté politique de la part du président de la République de régler la crise de Kabylie”. Car, estime saïd Sadi, le chef de l'Etat aurait dû prendre des mesures politiques immédiates mais, surtout, demander pardon au nom de l'Etat à une région qui a enregistré 123 assassinats. La détresse économique que vit présentement la région est, aux yeux du conférencier, “la conséquence d'une répression politique, d'un séisme politique.” Donc logiquement, des mesures auraient dû être prises pour soulager la détresse des investisseurs. Seulement voilà, on assiste à la démarche inverse. Le pouvoir s'affaire depuis un moment à normaliser la Kabylie par des méthodes peu orthodoxes : pourrissement de l'administration par des recrutements plus ou moins véreux, tentative de constituer des clientèles à travers des processus de corruption pour essayer de donner une représentation factice à la Kabylie. “Mais la Kabylie ne sera jamais représentée par des clientèles du pouvoir, elle ne sera jamais soumise par l'argent sale et la corruption”, tonnera Sadi sous un tonnerre d'applaudissements. “Le pouvoir est en train de reconstruire son autorité par la corruption. Cela ne tiendra pas, car il y a un vrai divorce entre le pouvoir et les citoyens.” La raison ? Il y a une forte concentration des pouvoirs. D'où, il faut décentraliser l'Etat. Sadi s'explique : “Le modèle jacobin français est une faute politique”. “Je pense que la Kabylie peut être, pour cela, un espace politique et pédagogique pour servir de modèle à une politique de régionalisation modulable.” Mais alors que faire maintenant que nous sommes à la veille de bouleversements historiques fondamentaux ? D'abord, il faut que la société se mobilise pour éviter une fraude de plus, à l'occasion de la présidentielle. Tout en précisant qu'aucune position n'est encore arrêtée par le parti concernant ce scrutin, Sadi exige tout de même des garanties, car sinon, “il y a risque d'implosion pour l'Algérie”. Ces garanties de transparence constituent une conquête citoyenne sur laquelle il y a matière à se mobiliser. “C'est l'une des missions d'un mouvement citoyen, ce n'est pas d'attaquer les partis politiques”, dira-t-il. L'allusion est claire. Des délégués sont manipulés et corrompus par Ouyahia, fera remarquer Saïd Sadi avant de pester : “Nul n'a le droit d'avoir comme fonds de commerce politique le sang des martyrs. Un mouvement citoyen est là pour approfondir les luttes citoyennes, il n'est pas là pour dénoncer les partis politiques. La Kabylie a une responsabilité historique dans la nécessité de restituer la culture civique et de l'imposer aux institutions de l'Etat”. Sur un plan plus général, et toujours à propos de la présidentielle de 2004, Sadi estime que l'opposition démocratique se doit d'imposer un scrutin crédible et de se mobiliser pour son propre compte. “Si on laisse le régime seul, il va composer avec les islamistes. Et cette alliance tourne toujours à l'avantage de l'islamisme”, appréhende-t-il. le leader du rassemblement, a enfin, annoncé la tenue des états généraux des patriotes républicains pour le 4 décembre prochain. Y. A.