C'est un Saïd Sadi incisif et corrosif qui était venu hier « témoigner » ou commenter les résultats du double scrutin pour le renouvellement des APC et APW au Centre international de presse. La violence et la corruption qui ont caractérisé l'opération de vote constituent une sérieuse menace pour l'unité et la cohésion nationales », avertit le président du RCD visiblement désabusé et d'évoquer « cette volonté politique clairement établie d'imposer l'hégémonie de cinq partis de la coalition présidentielle au mépris de la volonté populaire ». Et de dépassements, Saïd Sadi parle plutôt de « dérives particulièrement indignes et abjectes qui n'augurent rien de bon pour l'Algérie ». Les éléments des services de sécurité ont été spécialement ciblés par le réquisitoire de Saïd Sadi les accusant d'avoir fait irruption dans les bureaux de vote pour évacuer les « observateurs de l'opposition démocratique ». Au moins onze wilayas ont connu ce genre de pratiques, d'après l'orateur, notamment Alger, Sétif, Chlef, Tiaret et Tébessa. Plus grave encore, le leader du RCD accuse nommément le wali de Tindouf d'avoir lui-même distribué dans la rue des cartes de vote pour permettre au citoyen de voter deux fois, voire trois fois au profit du FLN. « Quand un wali, un chef de daïra, un DRAG ou plus généralement un agent de l'Etat se voit confier ce genre de mission, il est difficile d'attendre de lui un comportement qui honore la fonction d'une administration supposée être neutre et chargée de l'intérêt général et du développement », commente Saïd Sadi. Pis encore, il estime que ces pratiques et dépassements ont été vérifiés dans pratiquement toutes les wilayas du pays. Pour le président du RCD, le « dessein » est clair : l'opposition démocratique n'a plus le droit de cité en ville et elle doit être renvoyée à la montagne… C'est la principale leçon que Saïd Sadi tire de ce double scrutin, bien que son parti ait pu arracher des APC y compris à Tlemcen, Chlef, Tipaza, Collo, Ghardaïa et Djelfa, balayant ainsi l'étiquette de « parti régional » qui lui colle tellement à la peau. Un livre blanc contre la fraude Mais Saïd Sadi n'est pas forcément content. Et il en veut terriblement au président Bouteflika et à son ministre de l'Intérieur qu'il a désignés par l'expression peu glorieuse de « secte de Tikrit installée dans le Makhzen avec clientèle… ». Interrogé sur le score « vierge » de son parti à Alger où il avait traditionnellement ses partisans, Saïd Sadi a eu cette réponse un tantinet ironique : « Cette fois, ils nous ont sortis définitivement de la capitale... Les grands centres urbains, où il y a l'argent et les moyens, c'est pour eux. Pour nous, ils nous ont laissé la montagne. » Précisément, le leader du RCD a catalogué le PT et le FNA dont les scores ont été qualifiés de « miraculeux » dans la catégorie des « excroissances de l'alliance présidentielle arrivés lors des dernières législatives. Trouvez-vous normal que le RCD obtienne des sièges dans les APW d'Illizi, Tindouf et Tamanrasset et pas un seul à Alger, Sétif ou Boumerdès ? », s'interroge Saïd Sadi, précisant que « l'évacuation des observateurs, l'extinction des lumières dans les bureaux de vote et autres coups de force ont émaillé tous les grands centres urbains ». Pour le président du RCD, il ne fait pas l'ombre d'un doute que le « régime entend conserver et consolider le pouvoir politique et économique ». C'est ce qui explique d'après lui que les grandes villes sont tombées dans les bras des partis de l'alliance présidentielle dans l'ordre ou dans le désordre. « Il est significatif que même la wilaya de Béjaïa connue pour son potentiel économique soit raflée par le FLN », affirme encore Saïd Sadi pour appuyer ses accusations. Mais loin de baisser les bras, le leader du RCD s'engage dans les communes où son parti a arraché la majorité à faire en sorte de « soulager le quotidien des populations » et de « délivrer un message d'espoir aux Algériens en démontrant qu'il y a dans notre pays des institutions régies par la loi qui sont mises au service du développement ». C'est dans cette perspective que ce parti annonce la constitution d'une fédération des élus locaux « à moins que les autorités ne nous bloquent une nouvelle fois ! ». Concernant « les dépassements et la fraude » qu'il a dénoncés, le président du RCD promet la publication dans les « plus brefs délais » d'un livre blanc pour témoigner des « rôles et responsabilités de chacun ».