“Aucun boycott ne peut assurer qu'il constitue une alternative efficace à la participation”, écrit Aït Ahmed, qui estime pourtant que “les prochaines élections n'ont aucune chance d'être des élections ouvertes”. Partira ? Partira pas ? Après un mois de débat au sein du parti et ses démembrements, le Front des forces socialistes (FFS) n'a toujours pas tranché la question de sa participation ou non au prochain scrutin, prévu le 10 mai. Le parti d'Aït Ahmed, qui semble aborder un moment décisif de son histoire, continue à entretenir le suspense, même si quelques indices plaident plutôt pour la participation. Dans sa lettre adressée à la convention nationale du parti tenue hier à Alger, le président du parti, Hocine Aït Ahmed a fixé le cap, en des termes très sibyllins, à son parti, attitude du reste cultivée par tous les responsables et qui ressort en filigrane dans le rapport de synthèse de la commission politique. “Il est bien peu probable que les prochaines élections soient des élections ouvertes. En fait, et sans précautions inutiles, les prochaines élections n'ont aucune chance d'être des élections ouvertes. Nous ne pourrons donc pas assurer que nous allons sanctuariser le pays, veiller à la sécurité nationale et initier le changement démocratique en y participant”, admet Aït Ahmed. Et d'ajouter : “Nulle équipe, nulle institution n'est en mesure aujourd'hui d'assurer à l'Algérie une immunité électorale contre tous les périls qui la guettent”, avant de poursuivre : “Mais, par ailleurs, aucun boycott ne peut assurer qu'il constitue une alternative efficace à la participation.” Le choix est donc cornélien. Dans son discours d'ouverture, le premier secrétaire du parti, Ali Laskri, tout comme d'autres figures du parti ou des invités n'ont pas manqué, à l'unisson, de souligner l'impact de la conjoncture internationale sur l'équation politique algérienne et la problématique de l'élection législative. “La conjoncture internationale, son impact sur la région et singulièrement sur le pays, introduisent de nouveaux paramètres dans l'équation politique algérienne et la problématique de l'élection législative. Pour nous, une éventuelle participation à ces élections n'implique en aucun cas un consensus sur les règles du jeu politique tel qu'il se joue actuellement(…)”, affirme M. Laskri. Mais le FFS ne cache pas ses appréhensions des prochaines élections, histoire de suggérer qu'un éventuel boycott laisserait la porte ouverte à l'aventure où le régime va demeurer le maître du jeu. Rappelant l'épisode de 1992, Ali Laskri note que “nous pouvons aussi craindre (des prochaines élections, ndlr) que le régime persiste dans la logique des alternances claniques et se refuse à toute intégration des forces politiques représentatives, à toute ouverture démocratique. Le Parlement demeurerait alors le lieu de structurations de nouvelles alliances claniques, une chambre d'enregistrement des décisions du pouvoir ; ce qui accélérerait la déliquescence de l'autorité de l'Etat, maintiendrait le dialogue social dans la rue et la violence”. D'ailleurs, le parti juge, dans un message qui s'adresse sans doute à qui de droit et qui procède visiblement de “la pression”, qu'il n'est pas “trop tard” pour faire de la prochaine échéance une occasion de changement. En décodé : le FFS pose ses conditions. “Il n'est pas trop tard pour qu'elles constituent une voie possible pour initier le changement démocratique et à terme un mécanisme constitutionnel plus transparent, plus prévisible, donc plus rassurant. Un mécanisme qui replacerait la souveraineté populaire au cœur de la légitimité politique. Il est encore possible qu'elles permettent l'élection d'un Parlement représentatif où un début de pratique de séparation des pouvoirs serait envisageable et où la responsabilité politique aurait droit de cité”. “Le plus important à nos yeux : le contexte actuel fait peser des menaces réelles sur le pays. Nous pouvons espérer que des élections ouvertes constitueraient une contribution non négligeable à la sanctuarisation du pays, à sa sécurité nationale et à sa souveraineté”, affirme M. Laskri. Même dans le rapport de synthèse de la commission politique, la porte est laissée ouverte à une éventuelle participation. “Pour préserver notre pureté idéologique, nous pourrions refuser de nous associer à un jeu électoral que d'aucuns considèrent comme joué d'avance. Mais c'est oublier que la stratégie politique qui nous a toujours guidés dans le passé a toujours tenu compte du rapport des forces dans le pays et dans le monde”. La décision de participer ou de boycotter le scrutin est prévu dans quelques jours, lors du prochain conseil du parti dont la date n'a pas encore été fixée. K K