Qu'importent les obstacles dressés par la législation européenne sur le droit à une vie de famille. Nicolas Sarkozy veut supprimer l'automaticité du regroupement familial, mais aussi de la venue en France du conjoint étranger d'un Français. À la peine dans les sondages qui le donnent largement battu à moins de trois mois du premier tour de la présidentielle française, Nicolas Sarkozy reprend les armes anti-immigration dans l'espoir de refaire son retard. Président sortant, il évite avec soin de faire campagne sur les thèmes sociaux et économiques. Cela le conduit à faire son bilan. Et de mesurer l'immensité de la déception après un quinquennat marqué par de nombreux échecs. Ni le chômage n'a baissé, ni le pouvoir d'achat n'a augmenté comme il s'y était engagé. Alors, il donne un coup de barre à droite, avec les thèmes de l'identité nationale et de l'immigration. Comme il vient de le faire le week-end dernier lors d'un meeting à Bordeaux où il a conforté son ministre de l'Intérieur Claude Guéant. Celui-ci s'est retrouvé la cible d'un feu nourri après des propos liant le vote des étrangers aux élections municipales promis par les socialistes et une obligation de repas halal dans les cantines scolaires. “Quant aux cantines scolaires, elles sont aussi tenues au principe de la laïcité. Je m'opposerai à toute évolution qui irait dans le sens contraire”. Une idée qui n'a jamais été évoquée par quiconque. Et d'autant plus improbable que le candidat socialiste, François Hollande, veut inscrire la laïcité dans le marbre de la Constitution. Quand la droite française parle de laïcité, c'est pour s'adresser aux musulmans. Souvent sans les nommer. “Nul dans la République ne peut imposer aux autres ses modes de vie, ses traditions au nom de ses convictions religieuses. Nul ne peut nous demander de renoncer à notre mode de vie au nom d'une conviction religieuse. Il faut considérer nos jours fériés, la place qu'occupent dans nos villages et dans nos villes les clochers de nos églises et les tours de nos cathédrales, nos habitudes alimentaires, notre conception de la morale, non comme des faits religieux mais comme des faits de civilisation. Un peu de bon sens, de tolérance, d'ouverture d'esprit et de compréhension doivent permettre à chacun de trouver sa place dans la République. Ainsi, ceux de nos concitoyens que leurs convictions religieuses conduisent à ne consommer que de la viande abattue selon un rituel particulier, ont le droit de pouvoir le faire. Mais ceux qui n'ont pas les mêmes convictions ont le droit aussi qu'on les respecte. Je condamne sur ces sujets si sensibles les polémiques offensantes qui blessent inutilement. Reconnaissons à chacun le droit de savoir ce qu'il mange, halal ou non. Je souhaite l'étiquetage des viandes en fonction de la méthode d'abattage”. Après la laïcité et l'identité nationale, l'immigration que le président sortant veut réduire. Qu'importent les obstacles dressés par la législation européenne sur le droit à une vie de famille. Nicolas Sarkozy veut supprimer l'automaticité du regroupement familial. Mais aussi de la venue en France du conjoint étranger d'un Français. “La République ne peut accueillir dignement que si elle n'est pas submergée par un flot migratoire incontrôlé qui dépasse toutes ses capacités d'intégration et d'assimilation. L'immigration, c'est un atout, c'est une richesse, mais pourquoi ne pas reconnaître aussi qu'elle est un problème, qu'il faut la contrôler pour qu'elle soit compatible avec nos capacités d'accueil, avec la situation de notre économie, avec celle de l'école, avec l'équilibre de notre protection sociale ? Oui, l'immigration c'est un atout et se fermer conduirait comme toujours immanquablement au déclin. Oui, l'immigration c'est un atout et l'immigration zéro est une absurdité. Mais, oui, l'immigration est aussi un problème. Ne pas le reconnaître, c'est cacher la vérité aux Français. Et dans ce domaine, il n'y a rien de pire que le déni de la réalité. Ceux qui veulent relâcher la lutte contre l'immigration clandestine, ceux qui veulent régulariser massivement les clandestins ne se rendent pas compte des conséquences de l'appel d'air ainsi créé. Tout ceci dans le seul but de se gagner une clientèle électorale. Et ils donnent des leçons de morale ! Compte tenu de l'état de la société, de l'état de l'économie, de l'état de nos comptes sociaux, ce qui est raisonnable, ce qui est responsable, c'est de lutter sans relâche contre l'immigration clandestine, de continuer dans la voie de l'immigration choisie. La France doit pouvoir exercer son droit de décider qui elle choisit de faire entrer et demeurer chez elle. Elle ne peut pas laisser ce pouvoir seulement à des juges. Notre système d'intégration ne fonctionne plus. Il faut le réformer et le concentrer sur ceux qui sont sur notre territoire pour leur donner toutes les chances qu'ils méritent. En attendant que cette réforme urgente produise tous ses effets, nous devons réduire le nombre des arrivées sur notre territoire. C'est pour cela qu'il faut mettre des conditions au regroupement familial : un travail, un logement décent, l'engagement à apprendre le français… Il ne peut plus y avoir de regroupement familial automatique. Il devra en aller de même pour les visas d'entrée à la suite d'un mariage avec un Français”. À entendre le candidat de l'UMP, on croirait que son adversaire s'apprêterait à régulariser les quelque 400 000 clandestins qui se trouvent en France. Ce n'est pourtant pas dans son programme. Il veut des régularisations “au cas par cas” et “sur des critères clairs”. En réalité, au cours de ce quinquennat de M. Sarkozy qui met la lumière sur les expulsions, des dizaines de milliers de sans-papiers ont été régularisés. Environ 30 000 par an, selon les associations. Mais sur des critères qui ne sont pas lisibles, laissés à la discrétion des préfectures. Y S.