À en croire plusieurs titres de la presse marocaine de ce samedi, il est très probable que le gouvernement marocain annonce dans les jours à venir la rupture avec l'envoyé personnel du secrétaire général de l'ONU pour le Sahara occidental, Christopher Ross, qui aurait failli à son “devoir d'impartialité” dans le traitement de la question du Sahara occidental. Cette annonce du retrait de confiance au représentant de l'ONU serait ainsi imminente d'après le quotidien Akhbar Al Yaoum pour qui cette rupture est, d'ores et déjà, “inéluctable”. Le journal qui avait publié en exclusivité le programme du gouvernement Benkirane en veut pour preuve les échos qui lui sont parvenus de la rencontre de jeudi dernier entre le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon et le ministre marocain des Affaires étrangères et de la Coopération, Saâd Dine El Othmani qui aurait exprimé “les préoccupations du Royaume concernant le dernier rapport de son envoyé personnel et ses tentatives de dénaturer la mission de la Minurso”. Au sujet de cette rencontre qui s'est déroulée au siège des Nations unies à New York en présence notamment de l'ambassadeur du Maroc à l'ONU, Mohamed Loulichki, la MAP indique que le chef de la diplomatie marocaine a fait à cette occasion, “une présentation générale des derniers développements concernant la question du Sahara marocain, y compris l'élaboration du dernier rapport et l'adoption de la résolution 2044 du Conseil de sécurité de l'ONU, ainsi qu'une évaluation des efforts de l'envoyé personnel du secrétaire général de l'ONU, Christopher Ross”. Dans un entretien accordé à l'agence de presse officielle marocaine à l'issue de cette audience, Saâd Dine Othmani a déclaré avoir fait part au secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon “des préoccupations du Maroc concernant la teneur de ce rapport, les tentatives de dénaturation du mandat de la Minurso et les obstacles qui entravent le processus de négociation”. Il est à rappeler enfin que dans son dernier rapport (assez critique à l'égard du Maroc) le diplomate américain avait notamment laissé entendre que la confidentialité des communications entre le siège de la Minurso à Laâyoune et New York était probablement violée par la partie marocaine. Il semble que cette dernière révélation ait été “décisive” pour les Marocains. Et quand bien même la rupture n'est pas officiellement consommée, le quotidien Al Ahdath Al Maghribia ne s'empêche pas de titrer en une : “Le Maroc brandit” le carton rouge “à Christopher Ross en raison de ses positions pro-Polisario”. Le quotidien arabophone proche de l'USFP croit savoir que nombre de prises de position de Christopher Ross n'ont pas été du goût des responsables marocains. Et d'égrener sous forme d'un chapelet de griefs, son parti pris pour les “séparatistes”, son initiative d'élargir les attributions de la Minurso, sa proposition d'organiser une “visite prolongée” des membres du Conseil de sécurité au Sahara occidental considérée comme “une tentative d'internationaliser davantage l'affaire”. Le journal reproche également à Ross son laxisme dans l'opération de recensement des Sahraouis à Tindouf (considérés comme “des citoyens marocains détenus en Algérie”) en soulignant le refus algérien “constant” sur cette question au grand dam du haut commissaire pour les réfugiés. Le Maroc est présenté dans cette affaire comme “soucieux de garantir les droits de l'homme dans ses provinces du sud alors que Ross semble ne pas suffisamment donner de l'importance à la situation humaine et humanitaire dans les camps de réfugiés de Tindouf” où, selon cette assertion, les violations des droits de l'homme seraient très “fréquentes”. Bref, après avoir dressé sa longue série de reproches, Al Ahdath Al Maghribia conclut à la fin que Ross ne jouit plus de la confiance du Maroc à cause de “son comportement et de ses initiatives qui lui ôtent désormais toute crédibilité”. Il est à rappeler à ce sujet que Christopher Ross avait remplacé le Néerlandais Peter van Walsum dont le mandat avait expiré en août 2009 et qui n'avait pas été renouvelé après qu'il se soit discrédité auprès du Front Polisario en affirmant notamment que l'indépendance voulue par les Sahraouis était “irréaliste”. Cet épisode avait montré que pour concilier les positions, la confiance des deux parties était une condition sine qua non. Agé aujourd'hui de 69 ans, Christopher Ross, un brillant diplomate s'il en est et un fin connaisseur de la région, pour y avoir été notamment ambassadeur des Etats-Unis à Alger et directeur du Centre culturel américain de Fès, au Maroc, devait très certainement le savoir. M-C L