Nous avons vu le bédouin interroger le Prophète (QSSSL) pour apprendre sa religion dans un long jeu parfait de questions-réponses. En langage actuel, c'est comparable à une véritable interview. Il n'est pas le seul cas. Il y a aussi celui du Hadith de Omar Ibn El-Khatab (Que Dieu l'agrée) sur l'interrogation du Prophète (QSSSL) par, tenez-vous bien, l'Ange Gabriel (Sur lui le Salut de Dieu). Une véritable mise en scène sous l'œil curieux des compagnons rapprochés entre le Prophète (QSSSL) et un visiteur particulier au sujet des fondements de l'Islam. L'emploi fréquent de l'interrogation-réponse est aussi connu dans le style coranique comme moyen puissant de communication à large échelle. Les exemples sont nombreux et multiples. Nous en choisissons un de par sa clarté dans la forme, sa beauté dans le style et sa profondeur dans le sens. Dans l'appel sur le jeûne, le septième que compte sourate El-Baqara sur les treize qu'elle renferme, l'on note un verset sur la recommandation de recourir à l'interrogation pour apprendre la religion : “Lorsque Mes serviteurs t'interrogeront à mon sujet, (dis-leur que) je suis (près d'eux) et j'exauce le vœu de celui qui m'invoque. Qu'ils répondent donc à mon appel (par leur soumission) et croient en moi pour être bien dirigés". (186). La plupart des exégètes s'étendent de long en large dans l'explication de ce verset en limitant son contenu à l'invocation, ce qui est vrai en partie d'autant plus que, comme l'indique le Hadith, Dieu exauce l'invocation du jeûneur. Toutefois, comme le Coran explique le Coran, aussi source principale d'inspiration, ce verset a un autre sens tout aussi important que le premier : Il s'agit de la recommandation divine de l'emploi de l'interrogation pour apprendre les questions se rapportant à la vie des musulmans et du fiqh avec la bonne manière. S'agissant de question de fiqh, science de la religion et rites, il y a lieu de souligner que la lecture de ce passage, à la lumière aussi des hadiths nombreux qui l'accompagnent, privilégient la pédagogie, l'éducation, la persuasion, la preuve, l'adhésion et le bon sens. Les Algériens dans leur quasi-majorité d'appartenance aux rites et traditions malékites, développent aussi une vision de tolérance et de largesse d'esprit légendaire en s'inspirant profondément de ce mode de vie. C'est Allah lui-même qui donne l'exemple pour répondre aux interrogations des gens auxquels il est recommandé de connaître les enseignements de la religion. Tenez-vous bien, le verset est suivi par treize questions de la part des fidèles et, chaque fois, la réponse divine. Sur les treize, sept sont des réponses directes et six de façon indirecte par le biais du Prophète (QSSSL) en le chargeant de dire et de la porter à la connaissance des fidèles sous l'expression (Ils t'interrogent au sujet de .... dis : ...). Ce jeu de questions-réponses de façon directe entre le Créateur et ses fidèles touche aux aspects de la vie courante, comme les délices permis au mois de Ramadhan, et particulièrement la nuit, qui connaissent une animation particulière, la consommation licite et l'interdiction des biens d'autrui, la défense des Lieux Saints et l'accomplissement de l'Omra et du Hadj, dont le caractère incombe à ceux qui peuvent se le permettre, le respect et la prise en charge des parents et la guerre sainte. Il est à noter qu'en matière de guerre sainte, il n'y a aucune place au terrorisme et aux fetwas de tout bord pour s'autoriser le chaos et la fitna. Les bienfaits et méfaits de l'alcool et des jeux de hasard sont abordés en montrant les côtés négatifs qui l'emportent sur les côtés positifs et donc à éviter pour cette raison, la prise en charge des orphelins, l'interdiction du mariage avec les polythéistes, femmes et hommes, jusqu'à conversion. Ah si nos orphelins et enfants abandonnés et mères en détresse méritent les soins qui leur conviennent de nos jours ! Il est à noter que le mariage avec les gens du Livre, qui bénéficient de plus de considérations en Islam dans le cadre de la tolérance, est ouvert aux hommes aux conditions que les femmes soient respectables. Pour les femmes musulmanes, l'on ne ferme pas les portes puisque l'on exige la conversion du prétendant dans le but de préserver la famille et la cohésion sociale. Enfin la question délicate des femmes est développée plus longuement et avec délicatesse en occupant plus de vingt longs versets. Il est à noter que les paroles divines sont ouvertes à l'interprétation du hadith et des efforts des savants et autorités religieuses dans le cadre du débat d'idées et selon les circonstances, et du milieu. On a : - Question une et deux : (non apparentes dans le texte, pour éviter la répétition, mais déductibles de la réponse) : (l'approche des femmes et les délis durant le mois de Ramadan) : “Il vous est permis, la nuit (durant le mois) du jeûne d'avoir des rapports avec vos épouses..." et “Ne mangez pas illicitement des biens d'entre vous en les utilisant pour corrompre les juges..."(187-188) Question trois (le calcul lunaire): “Ils vous interrogent sur les phases de la lune, dis : ..."(189). - Question quatre (la défense des Lieux Saints): “Ils t'interrogent au sujet... dis : Combattez pour la cause de Dieu ceux qui vous combattent, mais ne dépassez pas les limites permises..." (190-195). - Questions cinq (l'Omra et le Hadj): “Ils t'interrogent sur... dis : Acquittez-vous intégralement du pèlerinage et la Omra envers Dieu..." (196-210). - Question six (les preuves accordées (miracles) aux fils d'Israël) : “Interroge les fils d'Israël, combien de signes manifestes nous leur avons fournis..."(211-214). - Questions sept (la bienfaisance envers les parents) : “Ils vous interrogent sur ce qu'on doit dépenser (par charité), dis : ..." (215). - Question huit et neuf (la guerre sainte et les mois sacrés) : “Ils t'interrogent sur... dis : Il vous est prescrit de combattre, et cette prescription vous l'avez en aversion" ; “Ils t'interrogent sur le mois sacré et la guerre en un tel mois [de trêve]. Dis : ..." (216-218). - Questions dix (le vin et le jeu de hasard) : “Ils t'interrogent sur le vin et le jeu de hasard, dis : ..." (219). - Question onze (le droit des orphelins) : “Ils t'interrogent au sujet des orphelins, dis : ..." (200). - Question douze (le mariage des croyants et croyantes avec des païens) : “Ils t'interrogent sur... dis : N'épousez point les femmes polythéistes avant qu'elles ne croient [en Dieu l'Unique]" (221). - Question treize (les femmes et leurs droits) : “Ils t'interrogent sur la menstruation, dis : ... (222-242). Ainsi présenté, il ressort que l'on a un schéma parfait qui permet d'avoir une approche claire, directe et concise. Le texte coranique, contrairement à ce que d'aucuns pensent, n'est pas un ensemble compact de versets, mais renferme un système de lecture doté de techniques communicatives permettant de véhiculer facilement le message universel. Il va de soi que c'est la main divine qui nous l'enseigne pour une inspiration éternelle. C'est une aubaine pour les récitants "parcœuristes" en allégeant leur fardeau et facilitant le rappel. Le passage long de plus d'un hizb (douze pages) se lit comme dans une autoroute communicative, éclairée de bout en bout. S B Prochain article Le dialogue comme moyen de communication : Scène de dialogue entre Moïse et Pharaon (sourate Echoura).