La virtuosité à la mandole de cet artiste fabuleux est incontestable, ses talents d'arrangeur et de compositeur le sont tout autant. Depuis 2010, il porte un projet musical pensé avec soin et précision. Ptit Moh, Mohamed Abdennour de son vrai nom, a animé, vendredi soir, au théâtre de verdure du complexe culturel Laâdi-Flici (établissement Arts et Culture), un concert exceptionnel et unique autour d'un projet musical des plus ambitieux, Ptit Moh Project, qui réunit de talentueux musiciens et qui donne un son contemporain aux musiques traditionnelles algériennes, surtout le chaâbi. Ce projet original fusionne la musique chaâbi à d'autres tonalités occidentales, comme le blues, le flamenco ou le jazz, ce qui donne au final un son contemporain, urbain et dans l'air du temps. Un son pensé avec soin et précision par Ptit Moh ; un son qui évolue “sur l'ensemble des registres mélodiques, rythmique et harmonique". Vendredi soir, les membres de Ptit Moh Project Sextuor (Smaïl Benhouhou, clavier ; Nassim, saxophone ; Martin, basse ; Aziouez, bendir, tar et bongos ; et Amar Chaoui, derbouka) ont offert une interprétation magistrale où chaque pièce regorge de surprises, autour des musiques traditionnelles algériennes et des dites “Musiques du monde". Compositeur et arrangeur de talent, Ptit Moh qui a commencé la musique aux côtés du maître Amar Ezzahi, à l'âge de 17 ans, a entamé sa prestation par “Yobadi". Un morceau du répertoire des Gnawa, sur lequel il a greffé de nouvelles paroles ; des paroles qui rendent hommage aux saints patrons d'Alger. Il a également changé le rythme : “J'ai fait une conjonction ou une fusion entre ‘Nesraf' qui est un rythme andalou avec El-Wahrani", nous a-t-il indiqué à l'issue de sa prestation. Le groupe enchaînera avec le morceau “Ana el Kaoui", revisité dans les couleurs du jazz, combiné vers la fin au style El-Wahrani. Le sextuor interprétera ensuite “Dehcha", un titre instrumental chaâbi, mais modernisé, et “Oliva playa", un morceau instrumental également que Ptit Moh a composé en Espagne avec plusieurs rythmes, puisqu'on retrouve “le pasodoble, le goubahi, le bourdjila, puis on passe à un rythme 5/8. Il y a un peu de tout, c'est un morceau qui évolue rythmiquement", nous signale l'artiste, également membre de la formation Gnawa Diffusion depuis 1999 (un groupe qui s'est reformé en 2012 après une séparation de cinq années). Le dernier morceau que le groupe (qui évolue aussi bien en quatuor qu'en sextuor), créé en décembre 2010 à l'occasion de Festivalgerie, a proposé est “Achaq ezzine" sur lequel Ptit Moh a composé une nouvelle mélodie. “C'est un morceau qui me tenait à cœur. J'aime les paroles et puis je viens de l'école du chaâbi et je voulais rendre hommage à cette musique", soutient-il. Alternant mandole à laquelle il donne une nouvelle image, très moderne, et guitare, Ptit Moh, installé en France depuis 1994, nous a, par ailleurs, expliqué que Ptit Moh Project est le fruit de “ce que je vis actuellement en Europe. Je fais plein de styles différents, et j'utilise ce que j'ai appris dans ma musique". Il nous parlera également de l'album qui est en préparation et qui sera prêt pour l'année 2013 : “Cela fait un moment qu'on essaie de le faire mais on est éparpillé sur d'autres projets. Les morceaux sont prêts, il ne manque que l'enregistrement que l'on pourra faire en deux semaines, parce que ça fait deux ans qu'on est dessus. On a d'autres compositions qu'on n'a pu jouer ce soir parce qu'on ne les a pas encore travaillées ensemble. Et là on se demande ce qu'on va mettre dans l'album." Un disque qui sera certainement excellent, tant les membres de Ptit Moh Projet ont trouvé la formule alchimique du bon groupe. S K