Rien ne va plus entre les Etats membres de la Ligue arabe, dont la réunion de leurs chefs de la diplomatie prévue hier à Djeddah en Arabie Saoudite a été reportée sine die, sans qu'aucune raison n'ait été avancée pour justifier cette annonce. Plus que jamais divisés depuis l'éclatement dans de nombreux pays, comme en attestent les positions de soutien ou d'opposition des uns et des autres aux révolutions populaires, qui ont emporté des régimes que d'aucuns pensaient inébranlables, à l'image de ceux de Zine El-Abidine Ben-Ali, en Tunisie, du colonel Mouammar Kadhafi, en Libye, ou de Hosni Moubarak, en Egypte, les dirigeants arabes confirment à nouveau leur division. En effet, le vice-secrétaire général de la Ligue arabe, Ahmed Ben Helli, a annoncé le report de la réunion des ministres arabes des Affaires étrangères, initialement prévue le même jour à Djeddah, en Arabie Saoudite, pour discuter du conflit en Syrie. “La réunion a été reportée à une date ultérieure", a déclaré à la presse le numéro deux de l'organisation panarabe, sans expliquer la raison de ce report. Il est clair que les divergences sont trop profondes sur cette question syrienne, et que les monarchies du Golfe avec à leur tête le Qatar et l'Arabie Saoudite veulent l'instrumentaliser pour s'imposer comme les nouveaux leaders du monde arabe. C'est une suite logique dans leur action après ce qu'ils ont fait pour accélérer la chute de Mouammar Kadhafi. D'ailleurs, le fait que les chefs de la diplomatie des six monarchies du Conseil de coopération du Golfe (CCG) constitué par l'Arabie saoudite, Oman, le Koweït, les Emirats arabes unis, le Qatar, et le Bahreïn, aient décidé de tenir, hier soir à Jeddah, une réunion extraordinaire, axée sur la crise syrienne, est un signe qui ne trompe pas sur l'importance de fissure entre ces Etats et le reste des pays arabes. Les initiatives de l'Arabie Saoudite, qui accueille demain un sommet extraordinaire de l'Organisation de la conférence islamique (OCI), sont un indicateur de la nouvelle politique de Riyadh dans la région du Moyen-Orient. Mais, rien ne dit qu'elle aura gain de cause, car la présence à ce rendez-vous du président iranien Mahmoud Ahmadinejad, un des principaux soutiens du régime de Bachar al-Assad, risque de contrecarrer les ambitions saoudiennes. L'organisation par Téhéran jeudi dernier d'une conférence à laquelle ont notamment participé la Russie et la Chine, deux autres soutiens de Damas, et qui a appelé à un “dialogue national" entre opposition et gouvernement, laisse penser que Mahmoud Ahmadinejad ne se laissera pas faire à Djeddah. Ceci étant, la “réunion d'urgence" de la Ligue arabe, que devait abriter Djeddah avait pour but de discuter du remplacement du médiateur international Kofi Annan qui a démissionné au début du mois en raison des divergences persistantes entre les camps occidental et russe sur les moyens de régler le conflit en Syrie. Cette division arabe reflète celle de la communauté internationale, laquelle éprouve toutes les peines du monde à s'accorder sur un règlement en Syrie où les violences et la répression du soulèvement contre le président Bachar al-Assad ont fait plus de 21 000 morts selon une ONG. Il ne fait aucun doute que le processus de paix israélo-palestinien, actuellement en panne, ainsi que la question de la minorité musulmane des Rohingyas en Birmanie, qui figurent également au menu du sommet de l'OCI, seront relégués au second plan. Pour rappel, l'OCI, qui mène campagne pour les Rohingyas, a annoncé, samedi, avoir obtenu l'accord du gouvernement birman pour apporter des secours aux déplacés de cette minorité musulmane et l'Arabie Saoudite s'est engagée à leur octroyer une aide de 50 millions de dollars. M T.