La grogne touche actuellement plusieurs régions de la Tunisie. Après Tataouine, la contestation s'est propagée jusqu'aux régions du Centre du pays. À trois semaines de la fin de la légitimité de l'Assemblée constituante, tous les coups sont bons pour faire valoir ses droits. Avant-hier lundi, quelques centaines de personnes ont manifesté à Sidi Bouzid alors que des enseignants ont observé une grève pour dénoncer l'arrestation de manifestants la semaine dernière dans cette région. La contestation a également gagné la région de Kasserine dans le Centre-ouest non loin de la frontière algérienne, où une grève générale a paralysé la localité de Laâyoune contre l'exclusion et le chômage qui atteint le taux de 50%. À Sidi Bouzid, les manifestants se sont rassemblés dans le centre-ville avant de tenir un sit-in face au siège du gouvernorat (préfecture), criant des slogans contre les islamistes au pouvoir et réclamant la démission du gouverneur. Dans la même foulée, une grande partie des enseignants du secondaire ont boycotté les cours dans la même journée, réclamant la libération d'un de leurs collègues. À rappeler que douze personnes avaient été arrêtées mercredi dernier après plusieurs jours de protestation contre le chômage et la précarité, et de nouvelles interpellations s'étaient produites le lendemain. Une grève générale avait déjà été observée samedi dans la localité de Menzel Bouzaïane, dans cette même région, pour la libération des manifestants. Les trois députés en grève de la faim -- Mohamed Brahimi, Ahmed Khaskhoussi et Tahar El-Ilah -- ont précisé dans un communiqué exiger eux-aussi la libération des personnes interpellées, l'arrêt des poursuites contre les manifestants et le limogeage du gouverneur de Sidi Bouzid. La région --qui compte près de 12 000 diplômés chômeurs--, accuse le gouvernement dominé par le parti islamiste Ennahda d'ignorer les revendications populaires, en particulier la création d'emplois. Dans la même région du Centre-ouest, à Laâyoune, des habitants ont défilé à l'appel de syndicats, d'ONG et de partis politiques pour dénoncer l'exclusion, le chômage et la pauvreté. Dans le même temps, trois élus à l'Assemblée nationale constituante, de partis différents mais tous les trois représentant la circonscription de Sidi Bouzid, ont entamé, avant-hier, une grève de la faim au siège de l'ANC. Cette grève exprime leur protestation contre les événements survenus à El Omrane (délégation de Menzel Bouzaïane, gouvernorat de Sidi Bouzid). Ahmed Khaskhoussi, un des grévistes a déclaré à la radio Shems Fm: "Nous revendiquons la libération des personnes arrêtées à El Omrane, l'arrêt des poursuites judiciaires à leur encontre et l'entame immédiate d'un dialogue pour trouver les solutions pacifiques et adéquates pour sortir le pays du chaos et de la violence". Tout a commencé à Tataouine le 18 septembre. La mobilisation a commencé après la publication des chiffres du chômage : 51,7 % dans le gouvernorat (région) de Tataouine, contre 17,6 % à l'échelle nationale, et 5,7 % à Monastir (côte). À quelques jours d'intervalle tombaient les résultats d'un concours d'entrée dans la Fonction publique : dans le Sud, le taux de réussite frôlait 0 %. “Nous voulons des quotas de recrutement par gouvernorat", assène Faouzia Taïeb, 32 ans, titulaire d'une maîtrise de français depuis 2005. Travailler “dans le public", c'est le rêve de beaucoup de Tunisiens, rétifs au privé où les entorses au droit du travail sont la norme.