Le commandant de la GN, le général-major, Ahmed Bousteïla, a mis l'accent sur le travail du renseignement afin de mettre en échec toute tentative de déstabilisation qui viendrait du Sahel. Tamanrasset, 16 octobre 2012. Il est 9h, nous foulons le tarmac de l'aéroport de la capitale de l'Extrême-Sud algérien, ex-Aguenar, baptisé au nom de Hadj Bey Akhamokh. À 2 000 km d'Alger, on est loin des discours politiques. La capitale du Hoggar et du Tassili flirte au quotidien avec ces multiples menaces qui nous viennent d'ailleurs. Des menaces véhiculées par les réseaux du crime transnational. La lecture est autrement profonde. Zone souveraine par excellence, Tamanrasset recèle de grandes potentialités terrestres — 1 200 km de frontières — et aériennes. Les criminels n'hésitent pas à franchir ces pistes hostiles pour pallier aux itinéraires et amocher une région à vocation touristique. Hélas ! Tamanrasset a beaucoup changé. Plutôt, elle a connu un rythme de développement très brutal avant de devenir un couloir de passage des contrebandiers, des terroristes, des narcotrafiquants, des trafiquants d'armes ou encore des milliers d'immigrés clandestins qui fuient la misère du Sahel à la recherche d'un eldorado. Mais surtout ces clandestins censés être infiltrés par Al-Qaïda. Le Sahel n'est pas aussi loin que cela puisse paraître. Ici, les distances n'ont aucun sens. À peine nous franchissons la célébrissime clé de Tam pour se diriger vers le chef-lieu de wilaya, et face à la montagne d'Adrianne, la sensation change. Et pour cause, Tamanrasset est devenue, vingt ans après ce sommeil morose, une ville aux grands enjeux. Ici, les troupes de la Gendarmerie nationale (GN) veillent au grain. Le patron de la GN, le général-major Ahmed Bousteïla, qui avait mis l'accent en 2008, lors de la manœuvre de Naâma, sur l'obligation de résultat, a instruit ses élites pour notamment “densifier le maillage territorial, mettre en place des sections de surveillance et de sécurité, renforcer les capacités de maintien de l'ordre et de sécurité routière, renforcer les gardes-frontières pour qu'elles surveillent les frontières contre toute intention criminelle et contre toute atteinte à l'économie nationale et valoriser le renseignement préventif en se rapprochant des populations", nous explique-t-on. Adapter la lutte et les moyens aux menaces émergentes M. Bousteïla a ensuite insisté sur les “valeurs fondamentales de l'institution, comme la discipline, la légalité de l'action, le professionnalisme et la rectitude dans le comportement", estimant que “les personnes seront appréciées en fonction des résultats obtenus". Ces axes, comme tant d'autres, relèvent de la stratégie constante, basée sur l'évolution, des évènements, et à laquelle le chef de l'Etat, Abdelaziz Bouteflika, a accordé une importance extrême. En ce sens, M. Bousteïla a insisté sur “la formation continue de l'homme sur le terrain pour capitaliser son expérience et ses connaissances". Il précisera que “les dispositifs mis en place progressivement tendent à adapter les moyens de répression de la Gendarmerie nationale aux paramètres induits par la criminalité organisée et l'émergence de nouvelles formes de criminalité, comme le trafic de stupéfiants, d'armes et la contrebande qui saigne l'économie nationale". D'ailleurs, lors de l'installation du VIe CR-GN, le colonel Mebarek Belourissi, le patron de la GN, en présence du staff du commandement, a réitéré sa disponibilité à mettre les moyens pour barrer la route aux réseaux criminels. Le message est clair : l'Etat algérien est plus que jamais décidé à détruire ces filières en leur déclarant une guerre sans merci aux frontières. Mais, ne dit-on pas que “la guerre se prépare en temps de paix" ? Permanente mobilisation face aux urgences À 14h, nous quittons Tamanrasset, direction Ouargla. Le patron de la GN a installé le ive Commandant régional, en la personne du colonel Abdelhafid Abdaoui, avant d'inaugurer le nouveau poste de commandement, l'ancien PC étant détruit par un attentat kamikaze. Là aussi, une réunion avec les cadres a permis de jauger également les dispositions des troupes à faire face au terrorisme et au crime organisé, sachant que la région de Ouargla est aussi sensible que Tamanrasset, notamment dans la lutte en profondeur contre la contrebande et le trafic d'armes. M. Bousteïla s'est ensuite entretenu avec plusieurs walis de la région, dont ceux de Ghardaïa, Ouargla, Laghouat ou encore Biskra. L'urgence étant de prendre en charge certains aspects liés aux opérations dangereuses, il a procédé au lancement de la 3e Section de sécurité et d'intervention (SSI), ces élites spécialisées dans la répression des criminels armés et les individus dangereux, avant d'inaugurer 80 logements d'astreinte, de la brigade de Zelfana et, enfin, visiter le tout nouveau chantier du Groupement d'intervention et de réserve (GIR) de Ghardaïa. Il faut noter qu'un laboratoire scientifique régional sera également lancé pour répondre aux besoins et aux urgences, notamment pour l'efficacité des opérations. Rattaché à l'Institut national de criminalistique et de criminologie (INCC) de Bouchaoui, ce centre sera doté de moyens modernes. Car, les frontières, c'est aussi le faux, le cannabis, la cocaïne, les armes et les explosifs et les produits chimiques servant à la confection de la fausse monnaie. Ce volet vient se greffer à la modernisation des moyens de contrôle du territoire, et ce, après l'introduction récente de la télésurveillance des frontières. La sécurité des convois et des entreprises en point de mire Mais le Grand-Sud ne signifie pas uniquement la menace externe. La menace interne, constituée de filières du grand banditisme, a toujours inquiété les autorités, les entreprises nationales et étrangères, les transporteurs de voyageurs ou encore les convoyeurs de marchandises. Il ne se passe pas un seul jour sans qu'on signale des vols de véhicules, notamment les 4X4 tout-terrain, des tentatives d'obstruction des routes ou des agressions contre les convoyeurs et les voyageurs. Eparpillées sur des localités distantes les unes des autres, les entreprises craignent l'insécurité alors que de grandes infrastructures et des ouvrages coûteux nécessiteraient une sécurisation maximale au vu de la montée de la criminalité dans la région. Aux grands maux, de gros moyens, Bousteïla a instruit ses troupes à faire preuve de vigilance. Satisfait des résultats de ses unités territoriales et des gardes-frontières, il a exhorté ses hommes à exploiter au mieux les moyens mis à leur disposition et à se rapprocher des populations frontalières. Le succès de cette lutte implacable est tributaire du renseignement.