Plusieurs dizaines de personnes, pour la plupart issues du corps diplomatique accrédité à Alger, ont pris part, hier, à une cérémonie de recueillement organisée conjointement par l'ambassade des Etats-Unis d'Amérique et l'ambassade du Royaume-Uni au cimetière militaire de Dély-Ibrahim à Alger. Il s'agissait de commémorer l'opération Torch du 8 novembre 1942 qui a consisté au débarquement de plus de 100 000 soldats alliés en Afrique du Nord. Les tombes sont si bien alignées et le protocole si bien réglé que la cérémonie a vite pris des allures martiales. La discipline était de rigueur. Il s'agissait bien d'une cérémonie militaire. Même notre Garde républicaine était là pour entonner la sonnerie aux morts. La plupart des 527 soldats qui sont enterrés au cimetière de Dély-Ibrahim sont majoritairement des Anglais, mais il y a aussi des ressortissants du Commonwealth (Australiens, Canadiens, Néo-Zélandais, Indiens). Ils s'appelaient Fletcher, Scott, Hancock, ou encore Jarvis. Ils sont venus parfois de très loin pour mourir à la fleur de l'âge en terre algérienne. Leurs sépultures bien entretenues racontent une page de notre histoire contemporaine. Elles donnent aussi l'occasion de réfléchir sur le chemin chaotique qui mène vers la paix. Plusieurs discours-évocations ont alors été prononcés à la mémoire de ces soldats tués lors des affrontements contre la barbarie nazie et ses affidés vichystes. L'ambassadeur américain, Henry S. Ensher a, d'emblée, situé l'enjeu de cette célébration qui consiste à cultiver le souvenir de l'une des plus grandes opérations de la Seconde Guerre mondiale. Pour sa part, l'ambassadeur de Grande-Bretagne en Algérie, Martyn Keith Roper, a choisi de déclamer un poème en l'honneur des soldats disparus. S'ensuivront plusieurs dépôts de gerbes de fleurs sur le monument érigé en haut du cimetière. Les différentes délégations composées essentiellement d'attachés militaires se succéderont pour se mettre au garde-à-vous et rendre le salut militaire. Une délégation de l'ANP, composée de quatre officiers, se pliera, à son tour, à ce rituel. Invité à prendre la parole, le général-major à la retraite, Abdelaziz Medjahed, ancien directeur de l'Académie militaire de Cherchell, a rappelé l'importance stratégique du débarquement en Afrique du Nord qui avait permis aux forces alliées de remporter la guerre en moins de trois ans alors que les Algériens resteront, eux, privés de liberté durant 20 années encore. Le général Medjahed, qui a rendu hommage à tous les combattants de la liberté, n'a pas manqué de souligner ainsi le sacrifice des milliers d'Algériens qui, eux, ont perdu le jour même de la “libération", le 8 Mai 1945, quelque 45 000 personnes. Les Algériens, qui connaissent donc mieux que quiconque l'importance et le bonheur de vivre libres, ont connu dans le sillage de l'opération Torch de lourdes pertes notamment à la suite des bombardements de la Luftwaffe à l'est du pays. Le général Medjahed a évoqué également le souvenir du président américain, Wilson, qui avait énoncé dès 1918 le principe de l'autodétermination des peuples en précisant que ceux de Palestine et du Sahara Occidental étaient toujours privés de ce droit consacré depuis par la législation internationale. Un jeune universitaire algérien, Abderrahamane Moussaoui, originaire de la localité de Messelmoun (à côté de Cherchell) où s'est tenue le 23 octobre 1942, une réunion clandestine entre le général Mark Clarck et des membres de la résistance française, a insisté, pour sa part, sur la nécessité de restaurer et de préserver ce lieu de mémoire. Il a révélé que ce site enchanteur, dont le général Clarck, était tombé sous le charme, comporte à ce jour une stèle avec pour inscription “Ici commence la route de la libération de la France, de l'Europe et du monde". M C L