Il fait l'objet de violentes diatribes de la part des acteurs politiques et des personnalités nationales. Beaucoup veulent sa peau. Avant avril de préférence. Ironie du sort, Abdelaziz Bouteflika, qui s'était présenté cinq années plus tôt sous l'étendard du “candidat du consensus” prend, à présent, l'allure de celui du “dissensus” pour reprendre la trouvaille géniale d'un de ses actuels ministres. En l'occurrence, l'homme que tout le monde adoubait en 1999 essuie sans cesse une enfilade de critiques souvent frontales l'invitant tout bonnement à “rentrer chez lui”. Bouteflika, lui, donne cette impression de ne pas tendre l'oreille au bruit de la rue ni au branle-bas de combat chez ses adversaires politiques. Tel un rouleau compresseur, il fonce la tête baissée comme s'il était rassuré quelque part. Il veut donner de lui l'image d'un président seulement soucieux des préoccupations des citoyens à travers ses périples interminables à l'intérieur du pays loin des remous médiatiques. Mais c'est juste un effet d'optique. Bouteflika, qui s'est déjà assuré du soutien du RND et de ses organisations satellites, en attendant l'onction probable du MSP, a engagé sa campagne depuis longtemps déjà. Ses bains de foule dans les différentes wilayas sont autant de messes électoralistes. Il y distribue de l'argent et honore les notables en attendant un renvoi d'ascenseur. On se rappelle de sa petite phrase en réponse à une question de Jean-Pierre Elkabach sur sa volonté de briguer un second mandat lors de la visite de Chirac en Algérie : “Si le peuple me le demande, j'irai volontiers !” Cette réplique sonne, maintenant, comme une méthode bien subtile de se faire désirer. Elle s'apparente à une véritable stratégie de campagne électorale. On l'aura remarqué, le président éprouve un malin plaisir à écouter studieusement les motions de soutien que lui lisent les élus locaux ou les moudjahiddine des wilayas. Le procédé devient de plus en plus prononcé, de plus en plus redondant. Au point où il serait naïf de croire que ce sont simplement des gestes soft de soutien. A Tlemcen, Aïn Témouchent, Bordj Bou-Arréridj, Batna et fraîchement encore à Jijel et à Mila, le président a eu son plaisir à écouter le refrain, désormais, en vogue : “Au nom des élus, du mouvement associatif et des moudjahiddine, nous vous demandons de vous porter candidat pour un second mandat”. Ce petit discours que les caméras de l'ENTV ne ratent jamais est sans doute le moment le plus important des visites du président après l'accueil populaire. C'est à cet instant que la “moubayaâ” est prononcée. Et les personnes qui lui font lecture de la déclaration de soutien énoncent point par point les “réalisations du Raïs” et les chantiers qu'il a ouverts, pour l'exhorter de finir son boulot… Il est bien sûr difficile de croire que ce sont des expressions de soutien tout à fait spontanéews. Bien au contraire, le rituel sent trop la mise en scène, dans la mesure où ce moment est même prévu dans le programme de travail remis aux journalistes ! C'est que Bouteflika veut envoyer le message à qui de droit, selon lequel, c'est le peuple qui le réclame et qu'il garde sa cote de popularité “intacte” malgré les tirs croisés qui le ciblent depuis longtemps. C'est son style de campagne, sa tactique qui consiste à se présenter en victime dans l'espoir de s'attirer la sympathie du peuple. Et tout porte à croire qu'il annoncera sous peu sa candidature, maintenant qu'il a fait le tour du pays et qu'il a tâté le “pouls de la base”. Et pendant que ses adversaires s'acharnent à le descendre en flammes pour le discréditer, lui, vend sa candidature à la population, aux électeurs avec le concours inestimable de la télévision. H. M.