Il est difficile de décrypter correctement, pour l'heure, les véritables motivations qui ont incité Ahmed Ouyahia à renoncer aux commandes du RND. Se prépare-t-il à faire la fameuse “rencontre de l'homme avec son destin", ou anticipe-t-il simplement sa retraite politique ? Ce qui est sûr, le désormais ex-secrétaire général du Rassemblement embourbe son parti dans des tracasseries statutaires et organiques qu'il aurait pu lui éviter s'il avait attendu la tenue du congrès ordinaire pour annoncer son retrait. La décision d'Ahmed Ouyahia de quitter les commandes du Rassemblement national démocratique est surprenante aussi bien pour l'opinion publique nationale que pour les militants et cadres de son parti. Nul ne pouvait se douter, à la veille de l'annonce de la nouvelle, que l'ex-Premier ministre allait entreprendre une telle démarche, tant aucun signe avant-coureur ne le présageait. La démission du secrétaire général est d'autant étonnante qu'elle intervient à moins de six mois de la tenue du quatrième congrès ordinaire du parti. Ce rendez-vous aurait constitué l'occasion idéale pour Ahmed Ouyahia de passer le flambeau sans mettre sa formation politique dans une impasse, voire une crise organique. Il est à relever, en effet, qu'en vertu des statuts du parti, le secrétaire général est élu par le congrès pour un mandat de cinq ans. Le 17 janvier prochain, il reviendra au conseil national d'élire un secrétaire général intérimaire, qui administrera les affaires courantes du Rassemblement jusqu'à la tenue de son congrès ordinaire en juin prochain. Il devra nommer aussi un nouveau bureau politique. Dans sa lettre de démission, Ahmed Ouyahia a indiqué que sa décision “n'est pas au service d'un agenda personnel comme pourraient le prétendre certains, son seul motif étant la préservation de l'unité de notre parti dont je demeurerai militant". Pourtant, c'est l'effet déstabilisateur qu'induira fatalement son départ anticipé du poste de commandement du RND. Il ouvrira inévitablement la voie à une guerre de successions acharnée entre les personnalités marquantes du parti, qui se mettaient, à ce jour, en retrait tant il leur était laborieux de rivaliser avec la stature d'Ouyahia. Il donnera aussi de la hauteur aux animateurs du mouvement de sauvegarde du RND, assez marginaux jusqu'à présent. Bien qu'il tente, depuis jeudi, de comptabiliser à son actif les raisons de la démission du secrétaire général du RND, ce mouvement n'était pas assez puissant pour constituer une telle menace. Statutairement, il n'avait, de surcroît, aucun moyen de démettre le secrétaire général de ses fonctions. Ahmed Ouyahia l'a rappelé, d'ailleurs insidieusement, dans sa lettre de démission, en notant que “sur le plan organique, aucune instance n'est en mesure de me destituer, excepté le congrès". La démission d'Ahmed Ouyahia de la tête du RND, qu'il préside depuis 1999, est, de ce fait, inspirée par des motivations qui échappent, pour l'heure, à toute analyse rationnelle. Se prépare-t-il à faire la fameuse “rencontre de l'homme avec son destin", comme il n'a eu de cesse de l'évoquer à chaque fois qu'on l'interpelle sur ses ambitions de briguer la présidentielle en 2014 ? Se démarque-t-il de sa chapelle partisane pour mieux faire le consensus autour de sa personne en perspective de ce rendez-vous électoral ? “Ma démission n'est pas au service d'un agenda personnel", a-t-il précisé, dans sa lettre de démission. Une précision au demeurant factice tant il est difficile de croire qu'un homme de son envergure et de son âge (à peine 60 ans) puisse prendre une retraite politique anticipée. S H