Résumé : C'est toujours la femme qui doit payer pour les fautes commises par les hommes. Je suggère donc aux femmes présentes de rejoindre le mouvement des femmes en difficultés afin de faire entendre leur voix. Une façon comme une autre de revendiquer des droits. Quelques-unes hésitèrent mais d'autres étaient prêtes à suivre mes conseils. La mère de Houria me regarde dans les yeux : -Moi je vous suivrais en enfer s'il le faut. Pourvu que toute la lumière soit faite sur la mort de ma fille. -Moi aussi, me dit enfin Kenza. Il n'en fallait pas plus pour que les autres femmes se joignent à elles : -Nous sommes toutes avec vous. Faites quelque chose... Ne laissez pas la société digérer des tabous inventés par ceux qui veulent cacher de tristes desseins. -Je suis tout ouie. Ne soyez pas trop agressives dans vos propos, et je vous écouterai jusqu'au bout. -Nous allons marcher avec les manifestantes, et crier haut et fort notre désarroi. Nous aimerions que chacune d'entre nous arrive un jour à se faire entendre et débatte de son cas sans un chaperon. Nous sommes toutes encore soumises à la bonne volonté masculine. Quelle est la femme qui n'a pas souffert au moins une fois dans sa vie de la discrimination, de l'humiliation et de la déstabilisation dans sa vie conjugale ? Je repense à Youcef. Si je n'avais pas résisté, il aurait lui aussi fait des siennes. Et puis, d'ailleurs à ce jour, nos idées sur les actions féminines et ma plume orientée dans ce sens ne semblent pas trouver un écho favorable auprès de lui. Il me laissait faire parce que je savais lui tenir tête. Même si cela demandait certains sacrifices, je tenais toujours bon. Et puis il y avait Mehdi entre nous... Mehdi ! Je bondis sur mes pieds. Mon Dieu, j'ai totalement oublié que c'était le jour de son anniversaire ! Je prends hâtivement mes affaires : -Bon... je... je vous tiendrais au courant pour la manifestation. Si vous voulez avoir des renseignements vous n'aurez qu'à vous rapprocher du siège de l'Association des femmes en difficultés. La présidente se fera un plaisir de vous recevoir et d'écouter vos doléances. Kenza, j'aimerais bien que tu passes la voir, elle fera beaucoup de choses pour toi. J'en suis convaincue. Heu... bien entendu, je ne vais pas t'abandonner ainsi à ton sort. Pour les autres, je vous promets d'écrire un long article sur tout ce que je viens d'entendre. La mère de Houria me lance : -Très bien, nous comptons sur vous madame. Heu... nous allons nous rendre dès demain avec Kenza à l'Association des femmes en difficultés. -Je téléphonerai à la présidente pour la prévenir de votre passage. Soyez fortes, ne lâchez pas. Même si nous ne gagnons pas à tous les coups, nous serons un exemple pour les futures générations. Sinon, nos filles et nos petites filles nous taxeront de lâches ! Sur ce, je m'empresse de quitter la rédaction. Dehors, il faisait nuit. Je repense à Mehdi et à ma famille qui devait être au complet ce soir chez moi. J'avais éteint mon mobile pour que l'on ne me dérange pas. Je le rallume. Une dizaine d'appels en absence s'affichent. Je rappelle Youcef qui décroche à la première sonnerie. Sans me laisser le temps de placer un mot il m'agresse : -Ah te voilà ! Que fais-tu encore dehors à cette heure-ci, d'autant plus que tu sais très bien que c'est l'anniversaire de ton fils ! T'es-tu au moins rappelée son existence ? Où es-tu donc passée ? J'étais sur le point d'appeler la police pour lancer un avis de recherches. Ma parole, ton égoïsme dépasse les bornes. Et surtout ne viens pas me raconter que tu as encore reçu des “cas" sociaux. Je lève les yeux au ciel. Mon mari adore se donner ainsi en spectacle... (À suivre) Y. H.