Le Forum des chefs d'entreprise a organisé, hier, dans son siège à Chéraga (Alger), un atelier de réflexion sur le droit positif algérien en matière de sûreté et son efficacité en matière d'accès de l'entreprise au financement de ses investissements. “Il est connu que l'accès au crédit bancaire figure comme un des obstacles majeurs le plus souvent invoqué par les entrepreneurs désireux d'engager des projets d'investissements productifs. Une des raisons de cette difficulté se manifeste, notamment, à travers l'incapacité des entreprises à répondre aux exigences formulées par les banques en termes de garanties préalables pour l'obtention d'un financement", souligne le FCE dans la note de présentation de l'atelier. “Il s'agit là d'un problème classique au sein de toutes les économies, à travers le monde. Dans les faits, il y a un juste équilibre qui doit être trouvé, puisque, autant l'entrepreneur est fondé à aspirer au financement de ses investissements, autant la banque est, elle-même, tenue de s'assurer de la solvabilité de l'emprunteur", a indiqué l'organisation patronale, précisant que l'outil que représentent les sûretés est indissociable du crédit bancaire. Il désigne les différentes garanties réclamées par le créancier à son débiteur. Les sûretés sont donc des précautions destinées à assurer le paiement d'une dette en cas d'insolvabilité. Dalila Khelfa rappelle que “la législation algérienne, en la matière, héritée du droit français, est complète, mais dispersée dans une variété d'instruments juridiques". Elle a indiqué, également, que les modifications, apportées au code civil qui date de 1995, “n'ont jamais concerné les sûretés". Dalila Khelfa a affirmé que le droit des sûretés “est extrêmement morcelé et difficile à mettre en œuvre". Il y aurait au moins une vingtaine de textes qui régissent les sûretés, un droit qualifié “de complexe". Mais pour Dalila Khelfa, si le droit des sûretés “a besoin d'être toiletté, l'outil juridique n'est pas à mettre en cause". Selon elle, l'environnement bancaire et financier peu performant relativise les limites du droit des sûretés : dix emprunteurs aux banques commerciales pour 1 000 habitants en Algérie, contre 120 emprunteurs en Tunisie et 700 en Turquie, domination excessive des banques publiques, un système de garantie peu utilisé et prise de risque sanctionnée par la justice. Dalila Khelfa rappelle qu'“une commission de révision du code civil avait formulé en 2009 des propositions pertinentes de réformes des droits des sûretés qui méritent d'être remises sur la table et prises en considération". Raïf Mokretar Karroubi, expert en banque, a expliqué les conditions pratiques dans lesquelles fonctionne aujourd'hui le droit des sûretés dans notre pays, d'un côté les banques qui estiment que celles-ci ne sont pas bancables, d'où l'obligation de prendre des précautions et de l'autre les entreprises, qui estiment que les banques ne veulent prendre aucun risque et se basent plus sur les garanties que le business plan. “Chaque acteur justifie son immobilisme par l'habitude de l'autre", affirme Raïf Mokretar Karroubi, relevant les distorsions du marché. Plus général, pour le président du Forum des chefs d'entreprise, les opérateurs économiques sont “trop sous l'emprise des garanties". Pis les banques demandent en plus des hypothèques, des nantissements et des cautions personnelles. Ce qui est excessif. D'où l'urgence de réformes structurelles pour moderniser le droit des sûretés et le rendre plus efficient, estime Mouloud Hedir, conseiller au FCE. Mouloud Hedir évoque la nécessité de mettre en place un instrument légal unique pour rééquilibrer les droits du créancier prêteur face aux privilèges spéciaux tels que sont définis aujourd'hui par la loi, faciliter la réalisation d'une sûreté et enfin opérer une refondation et une modernisation des sûretés mobilières pour assurer simplification, transparence et accès à l'information. M R