“Ma tdoum el hikma lelli ma kra hrouf el bali... Sarlou kif men nam ou fak, sabghiryeddoufesahra." “Point de sagesse à celui qui n'écoute pas le conseil des sages... En se réveillant, il risque de ne trouver que sa seule main dans le désert." Cinquante ans après l'Indépendance, le constat est mitigé : malgré des progrès significatifs dans plusieurs domaines (revenu par habitant, recul de précarité et des inégalités, accès à l'éducation, au logement, aux soins, à l'infrastructure, etc.), notre pays n'est pas encore parvenu, malgré son énorme potentiel, à accélérer son développement économique et social à l'instar des pays émergents. Le mécontentement reste fort, notamment pour les jeunes, face aux difficultés de la vie quotidienne, aux perspectives d'emploi souvent sombres, à la vie chère, à la difficulté d'accès au logement, et face à des services publics bien en deçà de ce que peuvent espérer nos compatriotes. Nous demeurons à la traîne dans plusieurs domaines, loin derrière des pays qui sont partis de conditions initiales semblables aux nôtres, il y a 50 ans. À titre d'exemple, la Corée a vu son revenu par habitant multiplié par 16, la Malaisie par 5 et la Turquie par plus de 3. Pourtant, contrairement à l'Algérie, ces pays ne jouissaient pas d'importantes ressources naturelles. 2020 : le scénario catastrophe n'est pas un mythe Dans ce scénario, il est fort probable que l'Algérien se réveille en 2020, paraphrasant notre poète, avec ses rêves évaporés et avec comme seule ressource une main ayant désappris le labeur... Si le statu quo actuel en termes de gouvernance publique et de politique économique se poursuit, à l'horizon 2020, notre pays pourrait avoir quasiment siphonné ses réserves de change, et le Fonds de régulation des recettes pourrait ne plus contenir un seul dinar d'épargne pour l'Etat. Selon un scénario probable où les prix du baril se maintiendraient, mais nos exportations d'hydrocarbures baisseraient face à une production stagnante et une consommation énergétique nationale en croissance, nous pourrions être obligés de recourir à l'endettement extérieur pour couvrir nos importations. La dette extérieure pourrait même retrouver des niveaux insoutenables durant les années 2020. En maintenant le train de dépenses actuel de l'Etat, les déficits successifs pourraient faire augmenter notre dette publique de moins de 1 400 milliards de dinars en 2012 (9% du PIB), à près de 3 000 milliards de dinars en 2020 (16% du PIB). Ces chiffres traduiront bien évidemment une dégradation des conditions de vie des Algériens et un net recul de nos capacités à créer de la richesse. Les efforts significatifs que nous devons accomplir pour construire un système éducatif de qualité ne pourront pas être financés, avec un impact négatif très fort sur l'employabilité de nos jeunes compatriotes. En ce qui concerne la santé des Algériens, nous pourrions assister à la réémergence d'inégalités profondes dans l'accès à des soins de qualité. Ce scénario est loin d'être improbable, et il sera le fruit de notre incapacité à construire une vision pour notre pays, réformer nos institutions, et définir une stratégie de développement, inclusive, ambitieuse et globale. 2020 : l'Algérie sur le chemin du développement À côté de ce scénario du “statu quo", il y a celui d'un réel changement, celui qui peut à jamais transformer l'avenir de notre pays. Dans ce scénario, les Algériens prendront collectivement la mesure des dangers auxquels les exposent l'attentisme, l'inaction, et par-dessus tout leur manque de confiance en eux-mêmes et les uns envers les autres. L'Algérie saura alors profiter de la fenêtre d'opportunités unique que lui offre la rente tirée des hydrocarbures entre 2013 et 2020. Le pays mobilisera l'ensemble de ses forces vives, où qu'elles soient, pour l'élaboration d'un nouveau pacte national de développement économique et social. C'est ce projet global, cohérent, et ambitieux que propose Nabni au débat public. Ce projet fait de “Cinquante chantiers de rupture pour bâtir l'Algérie de 2020", relié dans un ensemble cohérent et indissociable, des chantiers structurants, des virages dans les politiques publiques. Sur la base d'une vision partagée, une refonte globale de la gouvernance publique permettra de construire des institutions fortes au service du citoyen. De nouvelles politiques seront élaborées et mises en œuvre sur la base d'un calendrier préalablement établi et sous le contrôle des élus du peuple et des différentes institutions. Une majorité d'Algériens auront adhéré aux réformes et contribué à leur succès. À l'horizon de 2020, l'Algérie aura enfin rejoint le concert des nations émergentes. L'Algérie aura coupé le cordon de la rente, et sera créatrice de richesse. Le produit Intérieur brut (PIB) hors hydrocarbures aura augmenté de près de 50% entre 2012 et 2020 et sera près du double en 2025. Le budget de l'Etat sera financé à seulement 50% à l'aide de la fiscalité pétrolière en 2020 (et 20% en 2030). Grâce au développement du secteur privé et à l'extension de l'assiette fiscale, la part de la fiscalité pétrolière dans le financement du budget de fonctionnement de l'Etat tombera de 60% en 2012 à 25% en 2020, et à 0% en 2030. Les entreprises algériennes exporteront, en 2020, 7 fois plus qu'en 2012, faisant passer les exportations hors hydrocarbures à 4% en 2020, à 9% en 2025 et à 20% en 2030. En termes de climat de l'investissement, l'Algérie comptera parmi les 50 meilleurs mondiaux selon les classements internationaux. L'Algérie aura su investir une partie de sa rente dans le développent de la recherche et l'innovation et disposera d'institutions d'enseignement et de recherche de rang international. L'accès à la santé de qualité sera généralisé. Le système hospitalier public sera soumis à des normes de qualité de service et d'accueil qui seront mesurées et adoptées sur l'ensemble du territoire. La santé privée aura trouvée sa place comme complément au système public. Pour le meilleur et contre le pire Les estimations précédentes, extraites du rapport Nabni 2020, sont loin d'être des approximations hasardeuses. Elles sont les conséquences, inéluctables, de la voie que choisira l'Algérie dès 2013, celle pour le meilleur ou celle pour le pire. Le meilleur est possible. Il n'est pas trop tard d'engager le virage du développement et du progrès. Si l'Algérie se réapproprie ses rêves de l'indépendance, elle pourra mobiliser ses enfants pour concevoir et mettre en œuvre un projet global à la hauteur des énormes défis qui l'attendent et des aspirations de son peuple. Quelques éléments de débat, proposés par le rapport Nabni 2020, à paraître le samedi 26 janvier 2013. (*) poète maghrébin. (Voir www.nabni.org pour plus de détails). Le Groupe NABNI (www.nabni.org)